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sans ressources. Quand j’étais arrivé, il avait à peine de quoi vivre pendant un mois ; après cela, il aurait été dans l’obligation de tendre la main aux Arabes.

Le docteur se plaignait vivement de ce que ses objets d’échange avaient été confiés à des esclaves, malgré les fréquentes prières qu’il avait adressées à Zanzibar pour que tout lui fût amené exclusivement par des hommes libres. En répétant dans chacune de ses lettres que ces derniers seuls méritaient confiance, et qu’il ne fallait pas compter sur les autres, Livingstone n’écrivait rien de neuf. Il y a trois mille ans qu’Eumée disait à Ulysse :

« Jupiter a établi cette règle invariable : le jour, quel qu’il soit, où un homme est réduit en esclavage, cet homme perd la moitié de ce qu’il vaut. »

Plusieurs journées s’étaient écoulées depuis mon arrivée à Djidji ; elles avaient été heureuses, mais nous devions songer à notre course sur le Tanguégnica. Livingstone allait de mieux en mieux ; ses forces augmentaient graduellement sous l’influence du régime que je lui faisais suivre, avec l’aide de mon cuisinier.

Nous passions le milieu du jour sous la véranda, causant de nos projets et les discutant, revenant sur les dernières années et anticipant sur l’avenir. Matin et soir nous nous promenions sur la grève, afin de respirer la brise, qui était toujours assez fraîche pour rider la surface de l’eau et pour chasser sur le sable l’onde inquiète.

Le temps était délicieux ; nous étions dans la saison sèche, et, malgré la pureté du ciel, le thermomètre ne dépassait jamais, à l’ombre, 26°5.