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Tous en demandèrent. Je pris ensuite un flacon d’ammoniaque.

« Voilà, expliquai-je, pour guérir les maux de tête et la morsure des serpents. »

Aussitôt le chef de se plaindre du mal de tête et de vouloir de cette drogue. Je lui dis de fermer les yeux, et je lui mis le flacon sous le nez. Le résultat fut magique. Mon curieux tomba à la renverse, comme frappé de la foudre et avec des grimaces indescriptibles.

Ses officiers ne se sentaient pas d’aise ; ce n’étaient plus des rires, c’étaient des rugissements. Ils se pinçaient les uns les autres, battaient des mains, faisaient claquer leurs doigts, et mille extravagances. Pareille scène, jouée sur un théâtre, désopilerait immédiatement la salle la plus hypocondre. S’ils avaient pu se voir tels que je les voyais, ils se seraient fait rire jusqu’à en devenir épileptiques.

Ma-Magnéra finit par se relever ; de grosses larmes lui coulaient sur les joues, tant il avait ri lui-même ; et il fallut quelques instants avant que ses lèvres, que le rire faisait toujours trembler, pussent proférer le mot « kali » (drogue active, médecine ardente).

Il n’en demanda pas davantage, mais ses notables voulurent sentir le flacon ; et, à chaque reniflade de l’un d’eux, ce fut de la part de tous un nouvel accès de rire.

La matinée tout entière fut consacrée à cette visite royale, dont chacun fut ravi.

« Oh ! disait Magnéra en partant, ces blancs savent tout au monde ; les Arabes ne sont que de la saleté auprès d’eux. »