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sont désespérantes pour celui qui les éprouve ? De ces misères, en outre, dépendait l’expédition.

Les averses se multipliaient, annonçant la masika, et nous démontraient l’urgence de remplacer nos tentes ; Shaw et Farquhar y travaillaient activement. J’y reviens, parce que c’est là un point capital. Si j’ai pu résister à la fièvre, qui m’a saisi vingt-cinq fois dans l’espace d’une année, cela tient d’abord à la miséricorde divine ; ensuite à l’enthousiasme que m’inspirait l’œuvre que j’avais entreprise ; à la bonté de ma constitution, que j’ai eu soin de ne pas ruiner, en me refusant toute débauche ; à l’énergie qui est dans ma nature, à une disposition native qui me fait voir le bon côté des choses, et que rien n’a pu détruire ; enfin, à la précaution que j’avais eue de me procurer un abri imperméable.

Je conseillerai donc au voyageur de profiter de mon expérience et, au lieu d’accepter l’avis d’un fabricant de tentes, qui tiendrait à lui placer un de ses élégants produits, nullement faits pour tous les climats, de ne s’en rapporter qu’à lui-même, et d’acheter ce qu’il y a de plus fort et de plus cher en toile de chanvre, une bonne toile, n° 5, à l’épreuve de l’eau. C’est encore le meilleur marché, et cela peut être un moyen de salut.

Un autre point que je signale aux novices, afin de leur épargner une erreur, qui a beaucoup nui à mes plaisirs, et qui, en temps de disette, a de graves résultats, c’est le choix des armes. Le voyageur doit y apporter les plus grands soins. Il lui faut au minimum trois genres de fusil : un pour la plume, un pour la grosse bête, un autre pour la défense.

Pour la plume, je conseillerais des canons d’au moins quatre pieds de longueur et du calibre 12. Pour la grosse bête, sauf les égards dus à l’opinion des vieux sportsmen, je recommande les carabines d’O’Reilly et de Lancaster[1]. Pour le combat, on ne saurait trouver mieux que le sixteen-shooter américain, raïfle de Winchester, à seize coups, chargé avec les munitions d’Eley, armurier de Londres.

Quand je me sers du mot combat, je ne veux pas dire que le voyageur doive déclarer la guerre ; mais il peut avoir besoin de repousser l’ennemi. L’attaque est toujours imminente ; et il lui faut des moyens de défense capables de le protéger.

Pour ce qui est de la chasse, un jeune homme que j’ai rencontré à Zanzibar, m’a déclaré qu’il n’existait pas d’arme plus par-

  1. Fusil rayé, forte carabine.