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tous ceux qui m’ont trompé, entravé dans mes recherches, au lieu de remplir les engagements qu’ils avaient contractés en votre présence.

« En confiant à Ladha le soin de former ma caravane, vous sembler avoir ignoré que le gouvernement anglais défend à ses agents d’employer des esclaves. Le consul britannique à Loanda envoie à Sainte-Hélène chercher des serviteurs à peu près stupides, plutôt que d’encourir le mécontentement du Foreign Office en usant des esclaves portugais qu’il a sous la main, et qui sont d’une grande habileté.

« Dans les circonstances difficiles dont vous parlez, vu l’invasion du choléra, et la perte des lettres où je recommandais vivement d’employer des hommes libres, et non pas des esclaves, en l’absence des chèques qui se trouvaient dans le paquet perdu, peut-être ce qu’il y avait de plus simple était-il de recourir à Ladha ; mais j’espère que vous ne me taxerez pas d’ingratitude si je vous dénonce le fait comme une grave méprise. Ladha est un homme poli ; mais la traite des esclaves, comme les autres commerces de cette région, se fait presque tout entière avec les capitaux des Banians, sujets britanniques, qui palpent les profits, et laissent adroitement retomber sur les Arabes l’odieux de la vente des noirs. Ils nous détestent, nous autres Anglais, et se réjouissent de nos échecs plus que de nos réussites. Ladha vous a loué ses esclaves, et ceux d’autres Banians, à raison de soixante dollars par année, tandis que le gage ordinaire d’un homme libre est de vingt-cinq à trente dollars ; pour toutes les sommes dont il a fait l’avance, il prendra un énorme intérêt, vingt-cinq ou trente pour cent ; et, en supposant que Chérif ait menti en assurant que Ladha lui avait commandé de s’arrêter dans l’Oujiji, d’y rester un mois, de vendre ensuite toute la cargaison et de retourner à Zanzibar, il est étrange, pour ne rien dire de plus, que tous les esclaves des Banians aient affirmé, non-seulement qu’ils ne devaient pas me suivre, mais qu’ils devaient me contraindre à revenir. Je n’avais aucune prise sur des gens qui savaient ne pas conserver leurs gages.

« Il est également très-remarquable que votre caravane ait été détournée de son but, presque à l’ombre du consulat, et que ni drogman, ni fonctionnaires placés sous vos ordres, ne vous en aient informé. La réputation d’Ali ben Sélim ben Raschid, et celle de Shérif, son compère, ne pouvait guère leur être inconnue. Pourquoi employer de pareilles gens, sans autres garanties ?

« Votre très-dévoué,
« David Livingstone. »
16 novembre 1871.

« P. S. Je regrette d’être obligé de revenir sur cette affaire si désagréable ; mais je reçois des informations qui rendent la chose doublement sérieuse. Une lettre de M. Churchill, datée du mois de