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est qu’elles sont irréfléchies. Je les ai écrites sous l’impulsion des sentiments que j’avais alors. Je suis journaliste et voyageur, plus habitué à écrire au courant de la plume, qu’à polir mes phrases ; et j’ai mieux aimé laisser telle quelle l’expression de ce que j’ai ressenti ou pensé, que de la remettre en un style infiniment meilleur au point de vue littéraire, mais qui ne serait pas du tout le mien.

Au dernier moment, comme ces feuilles étaient presque toutes imprimées, je n’ai pas été, je l’avoue, moins satisfait que surpris de recevoir une invitation à dîner de la part des membres de la Société géographique

Depuis mon arrivée en Angleterre, et même avant, j’étais persuadé que le service qui m’avait été permis de rendre à la science, en assistant Livingstone, et en rapportant le résultat de ses travaux, j’étais convaincu, dis-je, que cette action n’était pas agréable à la Société géographique de Londres. Cette idée, qui chez moi était fixe, a pu rendre amer le ton de certaines remarques écrites dans ce volume ; je suis disposé à reconnaître en toute franchise que mon impression n’était pas fondée. Les grands corps se meuvent avec lenteur ; moi, j’étais impatient, ne doutant de rien ; je croyais, à tort, que le récit que j’avais à faire serait accueilli sans hésitation, admis sans réserve. Je pensais qu’en faveur de ce que j’avais à dire, la Société de géographie s’empresserait de me recevoir ; je ne songeais pas aux difficultés que rencontrent les mouvements d’un corps scientifique aussi auguste. Mais on dit que, si les moulins des dieux broient lentement, c’est avec sûreté ; de même la Société géographique de Londres a découvert avec lenteur et certitude que je n’étais pas un charlatan, et que j’avais réellement fait ce que j’avais dit. Elle m’a donné sa médaille, et tendu la main avec une chaleur, une générosité que je n’oublierai jamais. Je prie ses membres de croire que la reconnaissance qu’ils ont faite de mes humbles services, pour avoir été un peu tardive, ne m’en est pas moins précieuse. Je remercie particulièrement sir Henry Rawlison des paroles bienveillantes qu’il a dites à mon égard, et de la noble manière dont il a rétracté l’observation un peu vive qu’il avait émise avant de me connaître, et dans l’ignorance où il était, à cette époque, de certains faits qui lui ont été soumis depuis lors.

Enfin je garderai précieusement la médaille que m’a offerte la Société royale de géographie, ainsi que la riche tabatière dont Sa Majesté la reine Victoria m’a honoré.