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venir ; et bien qu’il se fût montré capable de supporter les fatigues et les privations de la route aussi bien que pas un de nous, il était évident qu’il en avait assez. Pour moi, notre échec a été une mortification profonde[1]. »

Je ne peux pas terminer sans dire encore un mot de l’expédition que nous avons rencontrée à Zanzibar, et qu’on envoyait à la recherche de Livingstone. Le retour de ses membres a été blâmé par le Conseil de la Société royale de géographie ; j’avoue que ce blâme ne me paraît pas juste. L’argent nécessaire à l’entreprise avait été fourni par le public, à une époque où le bruit s’était répandu que j’avais échoué. Un article, publié dans les journaux par le Conseil, fit alors appel au bon vouloir de ceux qui pouvaient se charger de l’expédition. MM. Dawson, William Henn et Oscar Livingstone se présentèrent et ne reçurent pas d’autre ordre que de chercher le voyageur et de lui porter secours.

Partis avec la ferme intention de remplir leur mandat, ils arrivèrent à Bagamoyo, où ils apprirent que le voyageur était retrouvé et n’avait plus besoin d’eux. Leur chef se hâta de revenir à Zanzibar pour en référer au consul britannique, ainsi qu’il en avait le devoir. Le consul fut d’avis que la mission n’avait plus d’objet, et fit entendre que Livingstone était l’ennemi des géographes de la métropole ; ce que confirmait, du reste, le post-scriptum d’un certain livre bleu. Sur quoi le lieutenant Dawson abandonna l’entreprise, persuadé qu’il était que sa présence déplairait au grand voyageur. Le lieutenant Henn, à son tour, ne résigna le commandement qu’après en avoir référé au consul. Le jeune Livingstone devint alors chef de la bande ; mais il commençait à souffrir d’une maladie grave, qui, toujours d’après mister Kirk, le rendait incapable de faire un pareil voyage. L’expédition fut dissoute, et ces messieurs repartirent pour l’Angleterre.

Voyons maintenant qui est responsable du fait. Quand le lieutenant Dawson me demanda ce que j’en pensais, je lui répondis : Cela dépend des ordres que vous avez reçus, et de l’engagement que vous avez contracté. On sait quel était son mandat ; quant à l’exécution, il devait s’en rapporter à ce que déciderait le consul. Donc, si mister Kirk a été d’avis que le voyage ne devait pas avoir lieu, parce que, n’étant plus nécessaire, il déplairait à Livingstone, ces messieurs étaient parfaitement fondés à revenir.

Tout le monde était dans son droit : ceux qui partaient, puis-

  1. Andersson’s, Lake Ngami, pages 228, 240, 251, 252.