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Puis-je vous demander, gentlemen, pourquoi, si Livingstone était dans l’abondance, vous lui avez envoyé des secours. Lorsque j’arrivai à Londres, vous aviez depuis huit jours les lettres du docteur. Qu’avez-vous fait alors ? L’ami Punch va nous le dire : « Le président de la Société royale de géographie, qui a découvert que Livingstone avait découvert Stanley, a fini par découvrir que Stanley était en Angleterre. Cette heureuse découverte parait avoir exigé de longs efforts, car il y avait une semaine que M. Stanley était arrivé, lorsqu’il apprit l’importante découverte dont il était l’objet. »

Le Daily Telegraph dit à son tour : « Une sérieuse amende honorable est due par les représentants de la Société royale de géographie à M. Stanley, qui a sauvé la vie du grand voyageur, et qui nous en a rapporté de si précieux documents. »

Vous m’avez alors remercié froidement par une lettre. Mais ce ne fut pas la seule expression des sentiments que vous inspirait la bonne nouvelle du salut de votre ami. Le vice-président de votre société, après délibération du Conseil, m’invita à une séance de la section de géographie de l’Association Britannique. Je ne manquai pas de m’y rendre, et fis une lecture dans laquelle j’annonçais la découverte de l’embouchure du Roussizi ; je combattis en outre certaines critiques adressées à Livingstone. Quand j’eus terminé, votre vice-président se leva, et, d’une voix douce et mielleuse : « Nous n’avons pas besoin, dit-il, d’histoires à sensation, ce qu’il nous faut, ce sont des faits. »

Quelles étaient donc ces histoires dont on n’avait pas besoin ? M. C. R. Markham lut ensuite un écrit du colonel Grant (l’ancien compagnon de Speke) afin de démontrer que c’était une extravagance de la part de Livingstone de croire que les sources du Nil se trouvaient par 11 degrés de latitude méridionale. Le papier ajoutait que le colonel Grant n’ayant pas rencontré, dans son voyage, traces de gorilles, ni de cannibales, ni d’indigènes mangeant du porc, ledit colonel pensait que Livingstone, qui en avait découvert, était allé beaucoup plus à l’ouest qu’il ne le supposait.

Le docteur Beke, à son tour, affirma que Livingstone était dans l’erreur, que le Loualaba n’avait rien de commun avec le fleuve d’Égypte ; et à la théorie qui en faisait le cours supérieur du Nil, M. Beke opposait les explorations de Schweinfurth. Cet éminent botaniste avait trouvé par de latitude nord une grande rivière, nommée l’Ouellé, qui paraissait venir des Montagnes