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conduire la caravane jusqu’à la plaine du Kingani, toujours couverte par l’inondation ; il s’engagea en outre à ne pas revenir avant que la bande fût en marche de l’autre côté de la rivière ; Mister Oswald Livingstone reconnut cette promesse par une forte gratification.

La daou était devant le consulat ; mes anciens compagnons allaient partir ; je leur adressai les paroles suivantes : « Vous retournez dans l’Ounyanyembé pour rejoindre le Grand-Maitre. Vous le connaissez ; vous savez qu’il est bon, son cœur est affectueux. Il ne vous battra pas, comme je l’ai fait. J’étais vif ; mais je vous ai récompensés tous ; je vous ai donné de l’étoffe et de l’argent, jusqu’à vous enrichir. Toutes les fois que vous vous êtes bien comportés, j’ai été votre ami. Vous avez eu une nourriture abondante ; je vous ai soignés quand vous étiez malades. Si j’ai été bon pour vous, le Grand-Maitre le sera bien davantage. Il a la voix agréable et la parole douce. L’avez-vous jamais vu lever la main contre un offenseur ? Quand vous étiez méchants, c’était avec tristesse qu’il vous parlait, non pas avec colère. Promettez-moi donc de le suivre, de faire ce qu’il vous dira, de lui obéir en toutes choses, et de ne pas le déserter.

— Nous le promettons, maître, nous le promettons ! s’écrièrent-ils avec ferveur.

— Quelque chose encore : avant de nous séparer, de nous quitter pour toujours, je voudrais vous serrer la main. »

Tous se précipitèrent, et une poignée de main vigoureuse fut échangée avec chacun d’eux.

« Maintenant prenez vos fardeaux. »

Je les conduisis dans la rue, puis au rivage. Je les vis monter à bord ; je vis hisser les voiles, et vis la daou filer au couchant, vers Bagamoyo.

Je me trouvai alors comme isolé. Ces compagnons de route, ces noirs amis qui avaient partagé mes périls, s’éloignaient, me laissant derrière eux. De leurs figures affectueuses, en reverrais-je jamais aucune ?

Le 29, MM. Henn, Charles New, Morgan, Oswald Livingstone et moi, nous montions à bord de l’Africa, où nous accompagnaient les vœux de presque toute la colonie blanche de l’île.

Nous nous dirigions vers les Seychelles ; en route nous aperçûmes la Mary A. Way, sur laquelle le pauvre Dawson avait pris passage. C’était pour nous un sujet d’étonnement que de voir Dawson aller à New-York pour se rendre en Angleterre. Arrivé à