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J’accorde le dernier point ; un seul individu même aurait suffi, et beaucoup mieux que deux hommes d’humeur antipathique. Quant à l’insignifiance relative de la course, je ne suis pas de cet avis. Il est infiniment plus difficile, pour un novice, de conduire une caravane dans l’Ounyanyembé, que de la mener ensuite beaucoup plus loin. Arrivé là, il sait par expérience ce qu’il doit faire ; et la seconde partie du voyage est peu de chose, comparativement aux difficultés des premiers pas. C’est là du moins ce que j’ai éprouvé. J’ai eu bien autrement de peine à gagner Kouihara, qu’à me rendre au lac et à en revenir. Si la connaissance que M. Charles New a du pays était précieuse pour une bande inexpérimentée, c’était surtout dans le trajet de la côte à l’Ounyanyembé et non pas au delà. Une fois dans l’Ounyamouézi, le lieutenant Henn et le jeune Livingstone auraient été compétents pour mener la caravane n’importe où, sans aucune aide.

Enfin, si M. New avait consenti à faire partie de l’expédition, alors que M. Dawson en était le chef, et cela pour donner à celui-ci le bénéfice de son expérience, c’était lorsque l’entreprise tombait, suivant lui, aux mains d’un homme incapable, qu’il était surtout lié par son engagement à lui prêter son concours, au moins jusqu’au moment où le nouveau chef aurait pu s’en passer. Pour quiconque a le sens droit, cela ne fait pas le moindre doute.

Que M. Henn eût pour objet principal de chasser le buffle ou l’éléphant, cela ne dispensait pas M. New de l’accompagner, de lui donner ses conseils, de le soutenir, de l’entraîner vers le but que, tous les deux, ils s’étaient chargés d’atteindre.

Le devoir de M. New était de partir : il s’y était engagé. Si plus tard M. Henn avait déserté son poste, réalisant ainsi la prédiction du consul, M. New aurait pris le commandement que, de son propre aveu, il souhaitait si fort, et il l’aurait fait en toute loyauté, en tout honneur.

Disons maintenant que si, dans le second acte de cette petite comédie, qui pourrait avoir pour titre : « Comment éviterons-nous de faire cela ? » M. New ne parait pas sous un jour favorable, au premier acte il s’est montré en quelque sorte héroïque ; j’ai pour l’abnégation, pour le courage, pour le zèle dont il a fait preuve alors, une sincère admiration.

Après neuf ans de résidence en Afrique, et à la veille de son départ pour l’Europe, où il va rétablir sa santé affaiblie, il est prié de se joindre, en qualité d’interprète, à l’expédition anglaise. Un instant de réflexion, et il s’engage à seconder de tous ses efforts