Page:Stanley - Comment j'ai retrouvé Livingstone, trad Loreau, 1884.djvu/565

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

était grave, au point de vue du succès de l’entreprise, je demandai au consul de nous réunir, afin d’amener le lieutenant Dawson et le lieutenant Henn à une meilleure entente. « Non, me répondit le consul ; ne faisons rien de tout cela ; Henn partira avec vous ; et après deux ou trois jours de marche, il se retirera de lui-même, et reviendra tranquillement. »

Ici je m’arrête. J’ai la plus haute idée du mérite de M. New, la plus grande estime pour sa noble vocation ; je lui ai prouvé que j’étais son ami, et je suis sûr qu’il me pardonnera de lui désigner, d’une manière toute bienveillante, la faute qu’il a commise.

D’après ce qu’on vient de lire, il est facile de comprendre que ces messieurs ne vivaient pas en bons termes. Je dirai plus : à écouter les bruits qui circulaient à Zanzibar, on aurait pu croire qu’ils étaient à couteaux tirés. Mais il n’y avait là rien que de superficiel ; des hostilités sans profondeur, et trop récentes pour que la querelle pût devenir sérieuse.

Tant qu’il y eut un chef reconnu, un leader ferme et incontesté, les germes de discorde sommeillèrent. La retraite du lieutenant Dawson provoqua leur réveil ; et l’offre du commandement, faite à mister New, les développa aussitôt. M. New demanda à réfléchir ; M. Henn, ne regardant pas comme définitif son désistement, qui n’était que verbal, réfléchit de son côté. Au bout de deux jours, le révérend déclara qu’il acceptait la direction, et le lieutenant qu’il la conservait. Or, celui-ci étant, dès l’origine, le supérieur de l’autre, c’était à lui qu’il appartenait de choisir, et sa demande lui fut accordée, ainsi qu’elle devait l’être.

Sur ce, retraite de M. New, qui donne pour excuse que « l’expédition n’est plus ce qu’elle a été dans le principe. » C’est ici qu’est l’erreur. D’après les termes de l’engagement qu’il avait signé, M. Charles New devait être sous les ordres de Henn, dans le cas où, par accident, le lieutenant Dawson ne continuerait pas à diriger l’entreprise. L’accident se produit, — rien moins que mon arrivée. Par suite de cet événement imprévu, le lieutenant Dawson renonce au commandement, qui, dès lors, revient à M. Henn auquel, en pareil cas, M. New s’est engagé à obéir : «… Je reconnaîtrai le lieutenant Henn pour chef de l’expédition et me conformerai à ses ordres. » L’organisation primitive n’est pas même en cause.

M. New dit ensuite « qu’il ne s’agissait plus que d’une course relativement insignifiante, que pouvaient faire deux hommes quelconques, pourvu que le succès les intéressât, et qu’ils eussent du courage et de la persévérance. »