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fus obligé de me retirer en sa faveur. On espérait néanmoins que je resterais le second du lieutenant Henn, et que je consentirais à agir sous ses ordres. Je l’aurais certainement fait, si la chose eut été nécessaire, ou même possible.

« Mais l’expédition n’était plus ce qu’elle avait été dans le principe. Il ne s’agissait maintenant que de se rendre à Kouihara ; une course relativement insignifiante que pouvaient faire deux hommes quelconques, pourvu que le succès les intéressât et qu’ils eussent du courage et de la persévérance. C’est ainsi du moins que j’envisageai la chose. Dès lors je me retirai, en donnant pour raison que mes services n’étaient plus nécessaires, et que ma présence ne ferait que compliquer une tâche facile en elle-même.

« On croit généralement que je m’étais engagé à servir sous les ordres du lieutenant Henn, quelles que fussent les circonstances. C’est une erreur. Je ne m’étais lié qu’avec l’expédition telle qu’elle avait été organisée en Angleterre, et je ne devais servir sous le lieutenant Henn que dans le cas où le lieutenant Dawson, par suite d’un accident, se trouverait dans l’impossibilité de conduire l’entreprise. Or ce n’était pas par impossibilité que le lieutenant Dawson n’était plus à notre tête. Il avait résigné ses fonctions et détruit par cela même tous les arrangements antérieurs, ainsi que le consul me l’a écrit dans sa lettre, en se basant là-dessus pour m’offrir la place vacante. Après la démission du lieutenant, de nouveaux engagements ont été pris ; et, en face de cette organisation nouvelle, chacun était libre de se retirer si bon lui semblait.

« Mais j’avais d’autres motifs pour ne pas accepter la place qui m’était offerte, sous les ordres du lieutenant Henn, qui selon moi était incapable de conduire l’entreprise. En quittant Zanzibar, il avait déclaré que son objet principal était le sport, et qu’il partait avec l’intention de chasser l’éléphant et le buffle. Un pareil homme n’était pas celui qui, dans mon opinion, devait être envoyé à la recherche de Livingstone ; et l’on n’aurait pas dû me proposer de servir sous un tel commandant, bien que j’eusse d’abord consenti à le faire, en cas de force majeure.

« Autre chose : le lieutenant Henn avait déjà parlé de se retirer avant de rien savoir à votre égard, faisant ainsi preuve d’une mobilité du plus fâcheux augure, et qui pouvait amener la perte de l’expédition dont il deviendrait le chef.

« En apprenant cette menace de retraite, je me rendis chez le docteur Kirk ; et après avoir montré à celui-ci combien la chose