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— Je ne crois pas utile de partir ; vous avez dégonflé mes voiles. S’il n’a plus besoin de rien, à quoi bon faire le voyage ? N’êtes-vous pas de cet avis ?

— Cela dépend des ordres que vous avez reçus ; vous les connaissez mieux que moi. Si vous n’avez pour mission que de chercher Livingstone et de lui porter secours, je peux vous affirmer qu’il a été trouvé et secouru ; il ne lui manque plus qu’un petit nombre d’objets, dont il m’a donné la liste, objets que tous n’avez pas, j’ose le dire. Mais dans tous les cas, son fils doit aller le voir ; je lui procurerai facilement tous les hommes nécessaires.

— Très-bien. S’il a tout ce qu’il lui faut, je n’ai pas besoin d’y aller.

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Je pensais avoir là une belle occasion de sport. J’ai la passion de la chasse, et j’aurais aimé à tuer un éléphant d’Afrique.

— Certes, Livingstone n’a pas besoin de vous. Il est approvisionné de manière à finir confortablement son voyage ; ce sont ses propres termes ; et il doit s’y connaître. S’il lui avait fallu autre chose, il l’aurait marqué sur sa liste. Et vous-même, êtes-vous bien pourvu ?

— Oh ! dit-il en riant, notre magasin est rempli d’étoffe et de grains de verre ; nous en avons cent quatre-vingt-dix charges.

— Cent quatre-vingt-dix charges !

— Oui.

— Et que ferez-vous de tout cela ? Il n’y a pas assez d’hommes sur la côte pour le transport d’une pareille cargaison. Cent quatre-vingt-dix charges ! Mais il vous faudra deux cent quarante pagazis, car vous serez obligé d’avoir au moins cinquante surnuméraires. »

À ce moment entra un jeune homme blond, grand et mince, ayant l’air fort distingué, la peau blanche, les yeux bruns et étincelants ; il me fut présenté par le lieutenant Henn : « Monsieur Oswald Livingstone. » Formalité superflue ; car ce jeune homme avait dans les traits beaucoup de ce qui caractérise ceux du docteur. Je remarquai chez lui tout d’abord un air de résolution calme. Dans le salut qu’il m’adressa, il fut peut-être un peu réservé ; mais je l’attribuai à une nature réfléchie qui faisait bien augurer de l’avenir.

Il serait difficile de voir un plus grand contraste que celui que présentaient ces deux jeunes gens. L’un était expansif, évaporé