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périorité des blancs sur les Arabes, et leur grande habileté en beaucoup de choses, ils n’avaient aucun pouvoir sur les nuages.

Quel que fut son désappointement, il ne douta pas de mon assertion ; et après avoir reçu le honga, qui fut très-léger, non-seulement il nous laissa partir, mais il nous accompagna pendant quelque temps pour nous indiquer le chemin.

Sur les trois heures, nous entrâmes dans une jungle épineuse ; et à cinq heures nous étions à Mouhalata, dont le territoire est gouverné par Nyamzaga.

Je m’étais lié avec un Mgogo, natif du Moulohoua, contrée située au sud-sud-est de Mouhalata et au sud de Koulabi. Ce Mgogo, qui disait m’être fort attaché, prouva ici qu’il était sincère. Il se joignit à Bombay pour faire régler le tribut, et soutint mes intérêts avec beaucoup de véhémence. Le lendemain, lorsque les gens de Koulabi voulurent nous arrêter, à propos du honga, il prit sur lui de répondre que nous venions du Kanyényi, et que nous n’étions pas sortis de l’Ougogo ; sur quoi, le chef fit un signe approbatif, et nous passâmes. À en juger par ce fait, il semblerait que les Vouagogo n’exigent rien des traitants qui se bornent à commercer dans leur province ou qui n’en franchissent pas la frontière occidentale.

Sortant de Koulabi, nous traversâmes une plaine argileuse au sol rouge et nu, où, tombant des hauteurs de l’Ousagara, dont nous avions en face de nous la chaîne d’un noir bleuâtre, le vent rugissait d’une manière effroyable. Sèches et pénétrantes, ces terribles rafales nous perçaient d’outre en outre, comme si notre corps eût été une simple gaze. Luttant bravement contre cette tempête incisive, nous traversâmes le pays de Moukamhoua ; et après avoir franchi le lit sableux d’un large cours d’eau, nous nous trouvâmes sur le territoire de Mvoumi, dernier chef de l’Ougogo, dernier exacteur de tribut. C’était le 3 avril.

Le lendemain, après avoir envoyé au sultan, par Bombay, accompagné de mon fidèle Mgogo, trente-deux mètres d’étoffe, nous nous plongeâmes dans le fourré ; et au bout de cinq heures de marche nous avions gagné les confins du Marenga Mkali, la plaine où l’eau est dure et amère.

De là j’expédiai à Zanzibar trois de mes hommes, porteurs de lettres pour le consul américain, et de dépêches télégraphiques pour le New-York Herald. Je priais le consul de renvoyer ces trois hommes le plus tôt possible avec une ou deux petites caisses de friandises, telles que pouvait les souhaiter un malheureux, af-