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En marche ! Pourquoi s’arrêter ? Avançons, et plus de faiblesse. Je montrerai à mes hommes une allure qui me rappellera à leur souvenir. En quarante jours nous, ferons la route qui nous a pris trois mois l’année dernière. »

Ces lignes sont extraites du journal que j’écrivais tous les soirs. Il y a six mois qu’elles sont tracées ; je n’en rougis pas ; mes sentiments n’ont pas varié ; un nuage trouble encore ma vue quand je songe au moment qu’elles me rappellent. Je n’ai rien à effacer, rien à modifier de ce que j’ai pu écrire alors. Si jamais vous allez en Afrique, que Dieu vous accorde pour compagnon un homme aussi loyal, aussi noble que David Livingstone. J’ai passé plus de quatre mois avec lui, dans la même demeure, dans le même bateau, sous la même tente ; je ne l’ai jamais trouvé en faute. Je suis d’un caractère vif ; j’ai souvent, je l’avoue, rompu des liens d’amitié sans cause suffisante ; mais avec Livingstone je n’ai jamais eu le moindre sujet d’impatience ; et, je le répète, chaque jour de notre vie commune n’a fait qu’ajouter à mon admiration pour lui.

Je ne veux pas infliger au lecteur la répétition du voyage qu’il a fait avec nous sur la ligne que nous allons suivre ; je ne rapporterai de notre retour que les incidents qui peuvent offrir un nouvel intérêt.

Le 17 mars nous étions au bord du Koualah, qu’un natif de Roubouga appela devant moi Nyahouba, et un autre Ounyahouha. Ce même jour tomba la première pluie de la saison. L’année précédente, la masika avait débuté sur la côte le 23 mars et avait fini le 30 avril, ce qui nous promettait de l’eau jusqu’à notre arrivée.

Nous bivaquions le jour suivant au Toura-Occidental, sur la frontière de l’Ounyamouézi, et le surlendemain nous nous arrêtions au Toura-Oriental.

Bientôt des coups de feu s’entendirent ; c’étaient Souzi et Hamoydah, accompagnés des deux hommes que j’avais laissés à Kouihara. Ils m’apportaient deux lettres de Livingstone ; l’une pour sir Thomas Maclear, ancien directeur de l’observatoire du Cap, l’autre pour moi ; elle était ainsi conçue :

« Kouihara, 15 mars 1872.
« Cher Stanley,

« En arrivant à Londres, si vous pouvez m’envoyer une dépêche, donnez-moi, je vous en prie, des nouvelles de sir Roderick, n’y manquez pas ; des nouvelles bien exactes.