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cevait une forêt. Laissant derrière moi le gros de la caravane, je partis avec quelques braves, qui, malgré leurs fardeaux ne se laissèrent pas distancer ; et marchant d’un pas rapide, j’arrivai au bout de deux heures à une côte où j’allais savoir à quoi m’en tenir sur l’exactitude de ma carte.

La pente fut gravie, le sommet traversé ; mes prévisions étaient justes : au bas du plateau, à mille pieds de profondeur, et à une distance d’environ cinq milles, était la vallée d’Imréra.

À midi nous avions repris possession de notre ancien camp ; les indigènes accouraient en foule, nous apportant des vivres et des félicitations au sujet de notre retour.

La caravane ne parut que longtemps après, et ne fut complétée que très tard. Rien ne peut rendre l’étonnement du guide, en voyant que la boussole avait si bien connu la route. Il déclara solennellement qu’elle ne pouvait mentir ; mais l’opposition qu’il avait faite d’abord à « la petite machine » avait ébranlé à jamais son crédit auprès de ses camarades.

Le lendemain fut un jour de repos, nécessaire à tout le monde. Livingstone avait les pieds ensanglantés ; ses souliers, qu’il avait hachés avec son couteau pour moins souffrir, étaient dans un tel état que pas un de nos gens ne les eût ramassés, quelle que fût leur ambition d’être chaussés à la monsoungou. Moi-même j’avais les talons au vif ; et, de mes chaussures ou de celles du docteur, il aurait été difficile de dire quelles étaient les plus mauvaises.

Le 18 janvier 1872, la bande se remit en marche. À quelques milles d’Imréra, Asmani s’égara de nouveau et je fus obligé de le remettre sur la voie, ce qui ajouta à la réputation que je m’étais faite comme guide et ce qui augmenta mon prestige.

Un grand changement s’était opéré depuis notre passage ; les grappes de raisin pendaient en bouquets au bord de la route, le maïs était assez avancé pour qu’on pût s’en nourrir, les plantes étaient en fleurs et la verdure plus brillante que jamais.

Nous arrivâmes le 19 à Mpokoua, le village abandonné, ou deux cases furent nettoyées à notre intention. À peine commencions-nous à en jouir, que la vue perçante de nos hommes découvrit quelques bêtes dans la plaine. J’avalai mon café, ma galette de maïs ; je pris le raïfle du docteur ; et, accompagné de Bilali, qui portait mon arme de rechange, je partis en toute hâte.

Un cours d’eau fut traversé, cours d’eau profond, puis son épaisse bordure, et je me trouvai à la lisière d’un bois, où je fus