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Autant que j’ai pu le savoir par les indigènes et par les Arabes les plus instruits de la chronique locale, le pays s’appelait autrefois Oukalaganza. Il eut pour monarque un prince du nom de Mouézi, qui fut le plus grand de tous ceux qui l’ont gouverné et de tous les chefs qui, à la même époque, régnaient sur les peuplades voisines. Pas un de ses ennemis qui pût lui résister à la guerre, pas un roi qui ait jamais eu autant de sagesse. Quand il mourut, l’empire, dont il était l’unique souverain, s’étendait depuis l’Ouhyanzi jusqu’à l’Ouvinza. Ses fils se disputèrent le pouvoir, et chacun d’eux, arrachant un lambeau du royaume, s’en lit un domaine qui, avec le temps, prit le nom de son nouveau chef.

Toutefois, la partie centrale de l’Oukalaganza, plus considérable que les districts perdus, resta aux mains de l’héritier légitime ; ceux qui l’habitaient furent alors désignés sous le nom d’Enfants de Mouézi, et leur province fut appelée Ounyamouézi, de même que les territoires détachés se nommaient pays de Konongo, de Sagazi, de Simbiri, etc.

À l’appui de cette tradition, que m’a racontée le vieux chef de Masangi, qui demeure sur la route de Mfouto, je rappellerai que le souverain actuel de l’Ouroundi porte le nom de Mouézi, et qu’en Afrique, du moins dans toute la région qui nous occupe, la majeure partie des villages sont désignés par des noms de chefs. Nous l’avons vu pour Misonghi, que Burton lui-même appelle Kadétamaré, du nom de celui qui le gouverne. Le Nyamboua, district de l’Ougogo, perd de plus en plus cette appellation pour prendre celle de Pembira Péreh, qui appartient à son vieux sultan. Mréra, dans l’Oukonongo, s’appelait jadis Kaséra, et a pris également le nom de son seigneur. Mbogo a donné le sien à un grand district de la même province ; Pumbourou, chef de Mapounda, a fait de même pour une partie de l’Ousohoua. Le nom d’Ouganda cède rapidement la place à celui de Mtésa ; et dans quelques années, peut-être une décade, les voyageurs entendront les Arabes parler du grand royaume d’Oumtésa ou d’Ounyamtésa. Décidément, je n’accepte pas la traduction poétique de Terre de la Lune, ou l’appellation malsonnante de Pays du Voleur. Pour moi, Ounyamouézi veut dire tout simplement Terre de Mouézi.

Je ne diffère pas moins d’opinion avec le capitaine Burton lorsqu’il suppose que le Niméamayi, placé par Dapper à soixante jours de l’Atlantique, est cette Terre de la Lune. Avec un cheval, on ne franchirait pas en deux mois la distance qui sépare l’Atlan-