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que criminelle, des traitants ; sur quoi je suis entièrement de son avis.

Ayant fini de prendre notre café et de discourir sur l’éthique, nous revînmes à notre pirogue, et nous nous dirigeâmes vers le Sentakeyi. Bien que ce cap fût à neuf ou dix milles de la petite grève que nous quittions, nous espérions l’atteindre avant la fin du jour. Mais le soleil se coucha ; et malgré la vigueur avec laquelle ramaient nos hommes, nous étions encore loin du but. Toutefois, profitant du clair de lune, et le danger de la position étant compris de chacun, la route fut continuée.

Il était près de huit heures quand nous nous arrêtâmes en un lieu désert, sur une langue de sable, adossée à une berge de huit à dix pieds de haut, et flanquée, des deux côtés, de masses rocheuses en désagrégation. Notre espoir était qu’en ne faisant pas de bruit, nous resterions inaperçus, et qu’après un repos de quelques heures, nous pourrions repartir sans avoir eu d’encombre.

À notre feu l’eau chauffait pour le thé ; à celui de nos gens se faisait la bouillie, quand les vedettes nous signalèrent des formes nombres qui rampaient vers le bivac. Ces formes rampantes se dressèrent à notre appel, et vinrent à nous en proférant le salut indigène : vouaké.

Nos Vouajiji leur ayant expliqué que nous étions des Vouangouana, leur dirent que nous partirions au lever du soleil, et ajoutèrent que s’ils avaient quelque chose à nous céder nous l’achèterions avec plaisir. Ils parurent très-satisfaits de cette demande ; et après un instant d’entretien, pendant lequel ils nous semblèrent prendre des notes mentales sur le camp, ils s’éloignèrent en promettant de revenir au point du jour et d’apporter des vivres.

Tandis que nous savourions notre thé, les gens du guet nous avertirent de l’approche d’une nouvelle bande. Ce fut le même salut, la même manière d’observer, la même assurance d’une amitié que j’estimai beaucoup trop vive pour être sincère.

Peu de temps après, troisième visite, absolument pareille, avec des protestations de plus en plus chaleureuses ; et nous vîmes deux canots croiser devant le bivac, d’une allure qui nous parut plus rapide que la nage habituelle.

Évidemment notre présence était connue dans les villages voisins, dont ces divers partis étaient les émissaires. Or, sur toute la route, depuis Zanzibar jusqu’au lac, jamais, sous aucun pré-