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avec empressement l’offre que je lui avais faite. Toutefois il s’inquiétait de l’avenir ; nous allions élucider l’un des points du problème ; mais ensuite, quel parti prendrait-il ? Sa position était réellement déplorable. Il avait avec lui Souzi, Chumah, Gardner, Hamoydah et Halimah, épouse de ce dernier. À ce petit groupe, s’ajoutait Kéïf-Alek, le messager qui lui avait apporté ses dépêches ; en tout cinq hommes et une femme. Pourrait-il se remettre en marche avec aussi peu de monde, et avec les bribes d’étoffe et les quelques grains de verre qui lui restaient après le vol de Shérif ?

S’il n’avait pas été malade, sa vigueur habituelle et son esprit énergique auraient tranché la question. Il aurait emprunté de la cotonnade à Séid ben Médjid, — un emprunt usuraire, — et serait retourné à la côte pour reformer une caravane. Mais il était trop faible. Et combien de temps resterait-il à Oujiji, s’il attendait les valeurs qu’il avait à Kouihara ? Combien de jours serait-il en proie à l’espérance déçue ? Répétant chaque soir : Peut-être demain,… et voyant les semaines passer inutilement. Ses dernières forces ne s’épuiseraient-elles pas dans cette cruelle attente ? Mirambo fermait toujours la route ; combien cela durerait-il ?

Avec tous les égards dus à sa longue expérience, je demandai à Livingstone la permission de lui soumettre plusieurs lignes de conduite, parmi lesquelles il n’aurait qu’à choisir :

l° Retourner chez lui, prendre le repos qu’il avait si bien gagné, et dont il paraissait avoir si grand besoin.

2° Se rendre à Kouihara, y recevoir ses marchandises, louer des pagazis, et repartir pour les bords du Webb, afin de continuer les recherches interrompues.

3° La caravane étant formée, essayer de rejoindre Baker. Pour cela, aller chez Mouanza, traverser le Victoria, en se servant de mes bateaux, ce qui lui ferait éviter Mirambo et Souarourou ; de là, se rendre chez Mtésa, roi d’Ouganda, puis chez Kamrasi, roi de l’Ounyoro, où il entendrait certainement parler du grand homme blanc, qui devait être à Gondokoro avec des forces imposantes.

4° De l’Ounyanyembé, revenir dans l’Oujiji, et retourner au Manyéma en prenant par l’Ougouhha.

5° Ou bien, de l’Oujiji, se rendre auprès de Baker par le Roussizi, le Rouanda, l’Itara et l’Ounyoro.

Quelle que fût la décision à laquelle il s’arrêterait, j’étais entièrement à ses ordres, ainsi que mes gens. S’il voulait regagner son pays, je serais fier de lui servir d’escorte, me soumettant d’a-