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cèrent Livingstone d’abandonner ce projet. L’ayant remis à plus tard, si faire était possible, le voyageur traversa le Tanganika pour se rendre à Ougouhha, situé sur l’autre rive.

À l’époque où Burton et Speke se trouvaient à Oujiji, la contrée vers laquelle le docteur portait ses pas n’était connue, même des Arabes, que par de vagues récits, dont les deux Européens ne paraissent pas avoir eu connaissance. Les plus intrépides dans la recherche de l’ivoire s’arrêtaient sur la frontière du Roua, grande province que le capitaine Speke a désignée sur sa carte sous le nom d’Ourouha, et qu’il a placée dans la direction que lui ont indiquée les Arabes.

Livingstone quitta la rive occidentale du lac à la fin de juin 1869, et se dirigea vers le Roua en compagnie d’un certain nombre de traitants. Quinze jours de marche, presque directement à l’ouest, l’amenèrent à Bambarri, premier entrepôt d’ivoire du Manyéma ou Manyouéma, ainsi que prononcent les indigènes. Il y fut retenu pendant six mois par des ulcérations graves qu’il avait aux pieds, et d’où s’échappait une sérosité sanguinolente dès qu’il voulait marcher.

Sitôt qu’il fut guéri, le voyageur partit dans la direction du nord. Quelques jours après il rencontra une rivière lacustre, d’une largeur d’un à trois milles, et qui se traînait au nord, à l’ouest, parfois au sud, de la manière la plus confuse. À force de persistance, il parvint à suivre cette rivière dans son cours erratique, et la vit entrer, par environ de latitude méridionale, dans un lac de forme étroite et longue, appelé le Kamolondo.

Il remonta cette rivière, continua à marcher au sud, et se trouva au point où il avait vu la Louapoula entrer dans le Moéro, dont elle sortait sous le nom de Loualaba.

Il faut entendre Livingstone décrire les beautés du Moéro, dépeindre cette magnifique scénerie où de hautes montagnes enferment le lac de toute part, et déploient jusqu’au bord de l’eau même le splendide manteau dont les couvre la riche végétation des tropiques. Une profonde déchirure de l’enceinte laisse échapper le trop plein du lac ; l’eau impétueuse se jette en rugissant dans cette gorge étroite, y roule avec le fracas du tonnerre ; et, la passe franchie, s’étend calme et paresseuse dans le vaste lit du Loualaba.

Pour distinguer cette dernière partie de la rivière d’autres cours d’eau, qui dans te pays, portent le même nom, le docteur l’a nommée Rivière de Webb, en l’honneur du propriétaire de Newstead