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— Pensez-vous qu’il y soit encore lorsque nous arriverons ?

— Je ne sais pas.

— Y est-il déjà venu ?

— Oui ; mais il y a longtemps.

Hourrah ! C’est Livingstone ! C’est Livingstone ! ce ne peut être que lui. Qui sait, cependant ? Cela peut être un autre, — un voyageur venu de la côte occidentale. Ou peut-être Baker ! Non ; Baker n’a pas la barbe grise. Mais il faut se hâter ; s’il allait savoir que j’arrive, et se sauver en l’apprenant !

J’ai dit à mes hommes que s’ils voulaient gagner l’Oujiji sans faire de halte, je leur donnerais à chacun huit mètres d’étoffe. Tous ont accepté ; leur joie était presque aussi grande que la mienne ; et j’étais d’une joie folle. Je voudrais être parti, résoudre cette question brûlante : « Est-ce bien Livingstone ? » Que Dieu me rende patient ! S’il y avait un chemin de fer, seulement des chevaux ! Avec un cheval je serais à Oujiji dans douze heures.

Nous avons quitté le Malagarazi, accompagnés de deux guides que nous a procurés Ousengé, le vieux passeur, qui, du moment où la rivière a été franchie, s’est montré plus aimable.

Une heure après nous arrivions au village d’Isinga. La marche avait eu lieu dans une plaine saline, qui, cependant, à mesure que nous avancions, devenait fertile et productive. Les gens du village nous ont avertis de n’avancer qu’avec prudence : une bande de Vouavinza, conduite par Makambi, l’un des principaux feudataires de Nzogéra, vient d’être victorieuse dans une expédition contre Lokanda-Mira ; et Makambi a pour habitude de ne rien laisser derrière lui quand il est vainqueur. Enivré par le succès, il attaque même sa propre tribu. Le résultat de sa campagne contre Lokanda se traduit par le meurtre de l’un des fils de celui-ci, par la destruction de deux villages, et le massacre de quelques hommes. La bande victorieuse en a perdu cinq, morts de soif dans la traversée d’un désert salin qui est au sud du Malagarazi.

4 novembre. Partis de bonne heure, avec précaution, et dans le plus profond silence. Les guides précédaient de loin la colonne, marchant à deux cents pas l’un de l’autre, afin de pouvoir nous prévenir à temps.

La première partie de la route s’est faite dans un bois d’arbres nains, bois d’une faible épaisseur, qui allant, toujours en s’éclaircissant, a fini par s’évanouir. Nous sommes alors entrés dans l’Ouhha, qui est un pays de plaines. Des villages de tous côtés, au