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Pendant ce temps-là, Sélim et ses trois acolytes exerçaient leurs dents tranchantes sur la viande d’un porcelet que nos chasseurs avaient tué, et pour laquelle mes Vouangouana professaient une aversion toute musulmane ; aversion qu’ils avaient acquise en passant de la qualité de nègres sauvages à celle de Zanzibarites.

Le lendemain, on se remit en chasse. Je tuai deux antilopes, un coudou (A. strepricère) aux belles cornes en spirale, et un pallah (A. melampus), animal d’un brun rougeâtre, ayant trois pieds et demi de hauteur et une large croupe.

J’aurais pu tuer ces animaux par douzaines, si j’avais eu l’un de ces pesants raïfles, d’une si grande justesse, que fabriquent O’Reilly, Lancaster ou Blisset, et dont tous les coups sont sérieux. Excepté mon fusil double, mes armes, je l’ai déjà dit, ne valaient rien pour le gibier que j’avais à poursuivre ; c’étaient plutôt des armes de guerre. Avec mon Winchester et ma carabine de Starr, je pouvais atteindre la bête à deux cents pas ; mais, bien que frappé, l’animal échappait toujours. .

Ce qu’il faut en Afrique, je le répète, c’est un gros calibre, un n° 10 ou 12, qui broie les os, de manière à faire tomber l’animal sur la piste, et à vous éviter ainsi fatigue et déception.

Pendant notre séjour au bord du Gombé, je me suis vu, à plusieurs reprises, frustré de la proie que j’avais atteinte après une rampée laborieuse, ou sur laquelle j’étais en droit de compter. Une fois, entre autres, il m’arriva de tomber sur un élan — pas vingt-cinq mètres de distance. J’avais à la main mon Winchester, je vise à la poitrine ; la balle pénètre profondément, le sang jaillit de la blessure ; la bête prend la fuite et disparaît : dans mon désappointement, je ne l’avais pas suivie.

Ces mésaventures me dégoûtaient de la chasse. Qu’est-ce que c’était que deux antilopes, quand on les voyait par milliers ?

Néanmoins, dans cette halte, qui ne dura pas trois jours, il fut tué deux buffles, deux sangliers, trois caamas, un zèbre, un pallah, trois petites Outardes, huit pintades, un pélican et deux aigles, sans parler de deux silures, qui furent pris dans le Gombé.

La plus grande partie de la venaison avait été boucanée ; nous pouvions braver le désert ; et le 7 octobre, je donnai l’ordre de lever le camp, au vif regret de mes amateurs de viande. Ils me firent prier par Bombay de rester un jour de plus. J’aurais dû m’y attendre. Chaque fois qu’ils pouvaient festiner, ils devenaient d’une paresse invincible.

Je grondai Bombay de s’être chargé de la requête, et refusai d’y