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CHAPITRE X

Toujours dans l’Ounyanyembé.


Pas un des chefs arabes ne pensa que je pusse avoir contre eux un sujet de plainte. Il ne leur vint pas à l’esprit que j’eusse le droit de me formaliser du lâche abandon qu’ils avaient fait d’un homme dont le concours avait été purement amical. La première fois que je les revis, leurs salaams furent les mêmes que si nos relations n’avaient pas dû s’altérer.

Mais je ne tardai pas à leur dire que la guerre leur étant personnelle, et qu’ayant quitté leurs blessés et leurs malades pour ne songer qu’à eux-mêmes, ils ne devaient plus compter sur mon alliance. Qu’avec leur manière de combattre, il leur avait fallu cinq ans pour triompher de Manoua-Séra ; que les blancs se battaient d’une toute autre façon ; que je connaissais la guerre, et que je n’avais jamais vu les miens fuir au premier échec, fuir d’une place forte telle que Zimbiso, et par un motif aussi mince. Qu’en se retirant, ils appelaient l’ennemi chez eux ; qu’ils en auraient d’ailleurs pour plus d’un an à lutter contre Mirambo, et que je n’avais pas de temps à perdre.

Ils m’affirmèrent l’un après l’autre qu’ils n’avaient pas eu l’intention de m’abandonner ; qu’ils me croyaient parti ; que les Vouanyamouézi avaient crié : « Le Mousongou s’en va ! » Qu’à cette nouvelle, leurs gens, pris de panique, s’étaient enfuis et que rien n’avait pu les rallier.

Dans la journée, ils continuèrent leur route sur Tabora, qui est à vingt-deux milles de Mfouto. Moins pressé de me rendre, je ne partis que le lendemain ; et, chargés de tous nos bagages, nous arrivâmes à Kouihara trois jours après notre fuite de Zimbiso.

Les extraits suivants de mon journal montreront mieux que