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les produits, qu’on pouvait se procurer en toute saison, n’étaient pas chers.

Les notables de l’endroit se trouvaient ainsi largement approvisionnés de lait, de crème et de beurre. En outre, mes Arabes qui, dans leur genre, étaient évidemment des gourmets, faisaient cultiver le froment autour de leurs tembés, et avaient fait planter des manguiers, des orangers, des citronniers et d’autres arbres à fruit qui prospéraient à merveille.

L’oignon, l’ail, le piment, le brinjall, la tomate, le concombre venaient également bien dans leurs jardins. Ils recevaient de la côte, au moins une fois par an, leurs provisions de thé, de sucre, de café, d’épices, de conserves de toute sorte, de confitures, de vins et de liqueurs, de biscuit, de sardines, de saumon ; et tous les objets dont ils avaient besoin : fines étoffes, parfumerie, etc.

Ils étaient riches en tapis de Perse, avaient une literie luxueuse ; des services complets pour le thé et pour le café ; des plats de cuivre étamé, et d’énormes cuvettes d’airain, d’une ciselure admirable. Presque tous avaient des montres et des chaînes d’or ; et de même que dans tous les pays musulmans, le harem faisait partie essentielle de leur maison. Chacun d’eux, selon ses moyens, nourrissait une bande plus ou moins nombreuse d’odalisques, afin que l’animalité de sa nature pût se satisfaire à Tabora comme à Stamboul. L’œil qui, d’abord, méprisait la figure peu classique d’une noire Africaine, a bientôt perdu le sentiment de la ligne et de la couleur, et ne tarde pas à errer voluptueusement parmi les courbes inharmonieuses de ces formes pesantes, à s’arrêter sur cette large face, dépourvue d’intelligence, et à se plonger dans ces yeux d’un noir de jais, mais privés de l’étincelle qui ennoblit notre pauvre humanité.

Les Arabes qui se trouvaient alors devant la porte de ma demeure, étaient ceux qui, la veille, m’avaient fait ce magnifique envoi. Je saluai d’abord, ainsi qu’il était dû, le cheik Séid ; puis le cheik Ben Nasib, consul de Sa Hautesse dans le Karagouah ; ensuite Thamis ben Abdallah, le plus noble de tous, noble d’esprit et de manières, noble par le courage, par les actes virils ; puis le jeune Amram ben Massoud qui, maintenant (1872), fait la guerre au sultan d’Ourori ; puis le bel et valeureux Saoud, fils de Séid ben Medjid ; puis la fleur des pois de la province : l’élégant Thani ; puis Massoud ben Abdallah, et son cousin Abdallah ben Massoud, qui possédait les maisons ou pour mieux dire la place où logèrent Burton et Speke ; enfin Séid ben Séif, puis le vieux Soliman