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— Ils achètent leurs femmes.

— Combien vaut une épouse ?

— Cela dépend. Un homme très-pauvre payera la sienne une couple de chèvres ; le mtémi en donnera une centaine, ou cent moutons, et même cent vaches. C’est un chef, et le mtémi, vous savez, n’achète pas une femme du commun. Pour lui, comme pour les autres, il faut le consentement du père, et livrer le bétail d’avance. Cela demande beaucoup de temps et beaucoup de paroles. Tous les parents et tous les amis de la fille ont à discuter la chose ; on ne s’entend pas tout de suite.

— En cas de meurtre, que faites-vous du coupable ?

— le meurtrier doit payer cinquante vaches. S’il n’est pas assez riche pour s’acquitter, le chef donne aux parents de la victime, ou à ses amis, la permission de le tuer. Ceux-ci, quand ils peuvent le saisir, l’attachent à un arbre et le tuent à coups d’assegayes, lancées une à une ; puis ils lui tranchent la tête, lui coupent les membres, et en dispersent les débris.

— Comment punit-on les voleurs ?

— Celui qu’on prend sur le fait est mis à mort immédiatement, et l’on n’en parle plus. N’était-ce pas un criminel ?

— Mais si le voleur n’est pas connu ?

— On le cherche. L’accusé est amené devant nous ; on tue un poulet : si les entrailles sont blanches, l’homme est innocent ; quand elles sont jaunes, il est coupable.

— Croyez-vous à la sorcellerie ?

— Naturellement. Celui qui jette un sort au bétail, ou qui empêche de pleuvoir, est puni de mort. »

De l’Ougogo, on entre dans l’Ouyanzi. Avant que des émigrés de l’Oukimbou vinssent s’y établir, c’était un désert où l’on souffrait tellement de la chaleur et de la soif, que les porteurs l’appelèrent Magounda-Mkali, ce qui veut dire Plaine embrasée. L’eau y était rare et les tirikézas nombreuses.

Maintenant, dans cette Terre brûlante, au moins sur la route du nord, celle qui passe par Mouniéka, l’eau ne manque plus, les villages sont fréquents, et le voyageur s’aperçoit que le Magounda Mkali n’a plus un nom qui lui convienne[1]. Les Vouakimbou, nous

  1. Déjà Burton, qui a suivi la route centrale en 1850, disait en parlant du Magounda-Mkali : « Sa mauvaise renommée ne sera bientôt plus que traditionnelle. Chaque jour la torche et la cognée restreignent ses proportions et diminuent les souffrances qu’imposait sa traversée, il y a quinze ans, il fallait pour le franchir douze grandes marches et plusieurs tirikézas ; il suffit maintenant d’une semaine.