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de voleurs d’enfants, de détrousseurs de caravanes dont les bois de cette région étaient infestés[1].

Les bandits, organisés par les traitants, fournirent bientôt à ceux-ci des Vouadoé, pris dans les districts les moins populeux. La vente de ces captifs, d’une beauté de forme et d’une intelligence remarquables, fut à la fois rapide et fructueuse, et les razzias se multiplièrent.

Parmi les chefs de ces expéditions était Kisabengo, dont nous avons raconté l’histoire, et qui, au trafic des habitants, joignant la conquête du sol, étendit l’Ouségouhha jusque dans la vallée où il fonda Simbamouenni. À l’époque de cette fondation, il ne restait plus qu’un petit nombre de Vouadoé ; presque tous avaient été arrachés de leur demeure.

Mais l’horrible chasse n’est pas terminée ; la plupart des guerriers vouaségouhha ont des mousquets ; et en retour des munitions que leur donnent les Arabes, ils continuent d’approvisionner ceux-ci de Vouarougourou, de Vouadoé, de Vouakouenni. En 1867 ils pénétrèrent dans l’Ousagara, au cœur même des montagnes, désolèrent les parties populeuses de la vallée de la Makata, et en ramenèrent cinq cents captifs.

Autrefois, dans ce pays, la guerre n’était causée que par les disputes des chefs ; elle est maintenant fomentée par les traitants de la Mrima, qui en ont besoin pour approvisionner d’esclaves le marché de Zanzibar.

L’escadre qui est en croisière dans ces parages a le pouvoir d’arrêter l’infâme négoce, au moins du côté des Vouaségouhha. Qu’elle détache un bateau à vapeur avec cinquante hommes, qui remonteront le Vouami jusqu’au village de Kigongo. Là, on n’est plus qu’à vingt milles de Simbamouenni : huit ou neuf heures de marche. Parti le soir, le corps d’armée attaquerait la ville au point du jour ; et, y mettant le feu, détruirait le pivot de la traite de l’homme dans cette partie de l’Afrique. Aidés par les marchands d’esclaves, les Vouaségouhha sont le fléau de cette région ; mais une fois leur repaire anéanti, ils seraient impuissants pour le mal.

C’est, dit-on, chez les Vouaségouhha que la croyance à la sorcellerie est le plus profondément enracinée ; ce qui n’empêche pas les adeptes de cette science ténébreuse d’avoir chez eux une vie des plus précaires. On trouve fréquemment, au bord de la route,

  1. Voir Burton (Voyage aux grands lacs), page 116. (Note du traducteur.)