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l’Oungérengéri, comme dans celle du Vouami, la force productive du sol est incroyable. Le terreau noir, riche alluvion déposé par ces rivières depuis tant de siècles, est d’une fertilité sans bornes. Toute espèce végétale y devient gigantesque. La tige des herbes y prend la grosseur du bambou ; et certains arbres, tels que le mparamousi et le mvoulé, ont leurs premières branches à cent pieds de hauteur. Le maïs, semé dans ces vallées, éclipse les plus belles récoltes des fonds de l’Arkansas, du Missouri et du Mississipi ; le sorgho a des chaumes qui rivalisent, pour le volume, avec les plus belles cannes à sucre ; il arrive à une hauteur de douze pieds. L’épaisseur des jungles est quelque chose d’effrayant, et la variété des espèces, arbres et plantes, mettrait à l’épreuve l’habileté du plus savant botaniste.

Ayant franchi cette région pendant la masika, nous avons été à même d’observer l’effet de cette dernière sur la végétation. Au début de la saison pluvieuse, l’herbe dépassait rarement le genou ; à la fin, c’est-à-dire en six semaines, elle avait gagné toute sa hauteur : douze ou quinze pieds. Un mois après, elle était complètement sèche ; les naturels y mirent le feu ; et pendant plusieurs jours toute la contrée retentit du rugissement des flammes, que surmontait un voile épais d’une fumée noire, dont le ciel était assombri.

Quand les feux s’éteignent, après avoir dévoré l’herbe, c’est alors qu’il fait bon voyager. On avance aisément, et les marches sont à peu près le double de ce qu’elles étaient avant l’incendie. Enfin, le regard peut embrasser l’étendue, errer d’un monticule à un pli de terrain, sans être arrêté par une muraille herbue qui se dresse entre lui et la perspective, et qui ne permettrait de jouir du paysage qu’à un homme ayant plus de cinq mètres

Il est extrêmement difficile de saisir les différences ethniques que présentent les Vouamrima et les Vouashenzi, gens de la côte et gens de l’intérieur. Je suis toujours à me demander comment le capitaine Burton a pu décrire avec autant de précision des lignes qui sont imperceptibles pour un homme ordinaire, tel que moi.

Il y avait à Bagamoyo des échantillons d’une foule de tribus : Vouangindo, Vouarori, Vouagogo, Vouanymouézi, Vouaségouhha, Vouasagara, que nous avons pu comparer avec les gens du Sahouahil ; et bien qu’ils fussent réunis, il aurait été malaisé pour tout le monde de les distinguer les uns des autres, soit par les traits, soit par le costume. Ce n’était que par certains détails, qui