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Arrivés à Kigoua, après une route de cinq heures, nous eûmes sous les yeux le même tableau qu’à Roubouga, les effets de la même vengeance : un pays dévasté.

Trois heures et demie d’une marche alerte nous conduisirent le lendemain au noullah qui sépare le territoire de Kigoua du district de l’Ounyanyembé. Une courte halte pour étancher notre soif, puis un nouvel effort de trois heures et demie, et nous nous arrêtâmes à Chiza.

Bien qu’un peu longue, cette course fut charmante : un pays pittoresque, offrant à chaque pas de nouveaux aspects, et des preuves du caractère paisible et de l’industrie des habitants. Une scène à la fois agricole et pastorale ; de tout côté le mugissement des vaches, le bêlement des moutons et des chèvres ; partout l’abondance, la richesse, la quiétude.

À peu près une demi-heure avant d’atteindre Chiza, nous avions eu sous les yeux la plaine ondulée où se trouve le principal établissement des Arabes.

Le chef du village, désirant me mettre en fête, m’envoya une jarre contenant vingt et quelques litres de pombé. Cette bière, dont la couleur était celle d’une eau laiteuse, et le goût celui d’une ale éventée, me parut peu agréable. Je m’en tins au premier verre et donnai le reste à mes hommes qui en firent leurs délices. J’y ajoutai un bouvillon, que le chef m’avait cédé au prix de dix-huit mètres de calicot, et qui fut tué immédiatement.

Pour toute ma bande la nuit fut courte ; longtemps avant l’aube les tranches de bœuf crépitaient sur la braise, afin que les estomacs pussent encore une fois se réjouir avant de quitter le Mousoungou, dont ils avaient si souvent connu les largesses.

Le repas terminé on donna six charges de poudre aux hommes qui avaient des fusils et qui devaient annoncer notre approche aux établissements arabes.

Tous les porteurs étaient en grande tenue, pas un qui n’eût sa plus belle choukka ; les moins riches en calicot tout neuf ; les autres en étoffes voyantes, cotonnade à raies ou à carreaux, soie et coton ou drap rouge. Les soldats en calottes neuves et en longues tuniques blanches ; car c’était le grand jour, celui dont on parlait sans cesse depuis l’heure du départ ; en vue duquel on avait fait ces

    nale de l’Ounyamouézi, envoyait des bandes nombreuses y détrousser les caravanes ; et le chef de Kigoua y faisait voler pour son propre compte. Un Arabe, entre autres, s’y était vu prendre cinquante balles de marchandises ; et malgré son escorte, l’expédition anglaise y eut un pagazi cruellement attaqué. (Note du traducteur.)