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L’affaire lestement terminée, à la satisfaction de tout le monde, le départ fut annoncé pour le lendemain. Dans la soirée, d’après Tordre du cheik Hamed, le premier guide réunit toute la bande et lui tint le discours suivant :

« Paroles, paroles du maître, s’écria-t-il. Prêtez l’oreille, kirangozis ! Écoutez, fils de l’Ounyamouézi ! Le voyage est pour demain. Le sentier est tortueux, le sentier est mauvais. Il a des jungles, où plus d’un homme sera caché. Les Vouagogo frappent les pagazis à coups de lance ; ils égorgent ceux qui portent l’étoffe et les perles. Les Vouagogo sont venus dans notre camp ; ils ont vu nos richesses ; ce soir ils iront dans la jungle. Soyez sur vos gardes, ô Vouanyamouézi ! Tenez-vous près les uns des autres. Ne vous attardez pas ; ne restez point en arrière. Kirangozis, marchez lentement pour que les faibles, les enfants, les malades puissent être avec les forts. Reposez-vous deux fois pendant la route. Telles sont les paroles du maître. Les avez-vous entendues, fils de l’Ounyamouézi ? »

Un cri unanime répondit affirmativement.

« Les avez-vous comprises ? »

Nouveaux cris affirmatifs.

« C’est bien ! »

La nuit était close ; l’orateur se retira dans sa hutte.

De Matambourou à Bihahouana, où se trouvait le premier camp, la route fut longue et pénible. D’abord, à travers un fourré de gommiers et d’acacias épineux, qui revêtaient des collines escarpées ; ensuite dans une plaine ardente où le soleil devint de plus en plus dévorant, jusqu’à tarir toutes les sources de la vie, transformant l’air en un voile embrasé, répandant partout un éclat douloureux pour la vue, qui cherchait vainement où se reposer de cette blancheur étincelante. Nous traversâmes plusieurs noullahs desséchés, dont le fond sableux portait les empreintes de nombreux éléphants, et dont la pente s’inclinait au sud-est et au sud.

Ce fut au milieu de cette fournaise que nous trouvâmes les villages de Bihahouana, presque invisibles, en raison du peu de hauteur de leurs cases, moins élevées que les grandes herbes qui fumaient autour d’elles, séchées et blanchies par l’air en feu. Nous nous arrêtâmes dans un vaste boma, situé à un quart de mille du tembé du chef. À peine étions-nous installés, que j’eus la visite de trois indigènes qui me demandèrent si je n’avais pas vu sur la route une femme et un enfant. J’allais répondre in-