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verrai mes pagazis ; ils pourront vous être utiles ; car c’est entre Réhennéko et Kiora que j’ai perdu neuf ânes ; il ne m’en reste plus qu’un. Tout le kaniki est dépensé ; mais j’ai encore un peu de mérikani.

« Mes respects à M. Shaw et à Sélim,
« Votre bien dévoué
« W.-L. Farqurar, »

Telle était la réponse qui m’était faite, et que je ne pouvais comprendre. Plus de kaniki, plus de guide, plus qu’un âne, et tout allait bien ! Sur la demande d’un simple soldat, il avait envoyé deux charges de mérikani, valant cent cinquante dollars en numéraire ; six cents mètres d’étoffe ! de quoi nourrir cinquante hommes de Bagamoyo à l’Ounyanyembé. Évidemment il était fou. J’allais le savoir, d’ailleurs, en arrivant à Kiora, où je vis de loin sa tente, perchée sur un tas de fumier.

Dès qu’il entendit ma voix, Farquhar se traina hors de sa demeure, ce qu’il n’avait pas fait depuis quinze jours. Je n’aurais jamais reconnu mon joyeux marin dans cet homme pâle et bouffi, aux jambes éléphantines ; il était parti de Bagamoyo si alerte et si pimpant !

Une colline aérée dominait le village ; j’y fis établir notre boma ; et, lorsque ma tente fut dressée, j’y fis porter le malade.

Interrogé sur son état, Farquhar me dit qu’il ne savait pas d’où cela lui était venu et qu’il n’éprouvait aucune douleur.

« Vous ne souffrez pas dans le côté droit ? lui demandai-je.

— Si, du moins je le crois ; mais je n’en sais rien.

— Il ne vous arrive pas quelquefois de sentir au-dessus de la mamelle gauche un élancement, accompagné de suffocation.

— Oui ; quelquefois j’ai l’haleine courte. »

Toujours des réponses ambiguës. La seule chose qu’il accusât nettement, c’était le mauvais état de ses jambes, horriblement gonflées, « Il avait un appétit de cheval, et n’en était pas moins faible. »

À l’aide de ce peu d’informations je découvris dans mon petit livre de médecine, « que l’enflure des jambes, et celle du corps, pouvaient résulter d’une maladie du foie, du cœur ou des reins. » Mais tous les symptômes ne s’accordaient pas. Ainsi nulle paresse des intestins ; bien au contraire. Quel était ce genre d’hydro-