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renseignements qu’on m’avait donnés, se trouvait dans une situation déplorable ; et Shaw s’était mis en frais de l’épître suivante :

« Mon cher Farquhar,

« À la requête de M. Stanley, je vous écrit pour assavoir ce qu’il en ait de vos infortunes ; quel quantitée d’étorfe vous avez dépensé et combien il vous en reste. Combien d’ânes est mort et en un mot tout le détail de vos afaire. Combien vous avé renvoyé de pagazis et combien vous en avé toujour. Qu’est-ce que vous avé fait de tout le bagage que les âne avait en premier ; et qui est à c’te heure votre karangazery. Comment est-ce que vous allé ? comment va Jacko ainsi que les ânes comment est-ce qu’ils von tous. Quel sorte de bagage est-ce que vous avez. Renvoyez Jarmian demain matin en retour avec Willimingo et Baricka et la réponce tout au long aux question ci-dessus. Dans deux jour nous seron avec vous, »

Si étonnante que fut cette lettre par sa forme et par son orthographe, elle me surprit beaucoup moins que celle de Farquhar, dont la réponse était ainsi conçue :

« Cher Monsieur Stanley,

« Tout va bien ; mais il m’a fallu pas mal de cotonnade pour solder les pagazis ; un ballot y a complétement passé. Le kirangozi était un gredin, je lui ai pris son étoffe et l’ai chassé ; il m’a dit qu’il vous porterait ses plaintes. Je l’ai remplacé par Kiranga, auquel j’ai donné, à cette occasion, dix dotis.

Ici les denrées sont très-chères : une choukka[1] pour deux poulets, cinq dotis pour une chèvre, et je ne peux pas m’en aller.

« J’ai loué hier six porteurs que j’ai fait partir avec Ourédi. Jouma disait qu’il mourait de faim ; je lui ai donné deux ballots de mérikani ; il vous attendra dans l’Ougogo. Jacko a été malade, je ne sais pas de quelle affection ; mais il ne m’a rendu aucun service. Willymingoe est maintenant mon cuisinier. Pouvez-vous m’envoyer du sucre ? Si vous avez besoin de secours, je vous en-

  1. La choukka, braça des Portugais du Mozambique, est un morceau d’étoffe, en général de calicot écru, mis autour des hanches en guise de jupon ; elle se porte également d’autre manière. Sa largeur varie d’après celle de l’étoffe qui la compose ; mais sa longueur est toujours de quatre coudées. En 1857, elle valait communément à Zanzibar, soixante-quinze centimes, prise en gros ; sur la côte environ un franc trente, et dans l’intérieur un dollar, et plus. Deux choukkas font un doti. (Note du traducteur, d’après Burton.)