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des rivières qui le composent, et dont la Makata est la plus forte, prennent leur source dans le croissant que les monts d’Ousagara décrivent au sud et au sud-ouest, tandis que laRoudéhoua descend de la partie nord de la même chaîne.

Si rapide était alors le courant de la Makata, si dangereux le pont vacillant et à demi submergé, que le transport des bagages d’une rive à l’autre demanda cinq grandes heures. À peine avions-nous déposé sur le bord tous ces ballots, dont pas un n’avait été mouillé, grâce à des soins excessifs, qu’une pluie torrentielle les trempa, comme s’ils fussent tombés dans la rivière.

Essayer de franchir le marais qu’avait formé ce déluge, était hors de question ; et il fallut camper dans un lieu où chaque heure apporta sa part d’ennuis.

Kingarou, l’un de nos soldats, profita de l’occasion pour s’enfuir avec l’équipement d’un camarade. Oulédi et Sarmian, tous deux armés de carabines se chargeant par la culasse, furent envoyés à sa poursuite, et partirent avec une célérité de bon augure. Effectivement, ils revinrent une heure après avec le fugitif. Ils l’avaient trouvé chez Kigondo, un chef de village qui demeurait de l’autre côté de la rivière, à une distance d’un mille, et qui arrivait avec mes trois hommes pour recevoir sa récompense.

Quand il fut assis, Kigondo raconta le fait de la manière suivante : « Nous étions, ma femme et moi, à veiller sur notre maïs, du haut de la petite hutte que nous avons établie dans notre champ pour y faire le guet. Je vis de loin un homme, qui était chargé d’un ballot et qui courait très-vite, d’où je reconnus que c’était un déserteur. Comme le sentier longe notre cabane, l’homme était obligé de passer prés de nous. Dès qu’il approcha : « Maître, que je lui criai, où allez-vous si vite ? Ne quittez-vous pas le Mousoungou ? car vous lui appartenez, je vous reconnais ; c’est vous qui nous avez acheté de la viande pour deux dotis. — Oui, dit-il, je me sauve ; je m’en vais à Simbamouenni ; si vous voulez me conduire, je vous donnerai deux choukkas. — Venez chez nous, que je lui dis ; nous causerons de cela tranquillement. »

« Quand il fut à la maison, dans une chambre intérieure, je fermai la porte ; et ma femme et moi nous retournâmes à notre maïs, mais non pas sans avoir recommandé aux voisines de veiller sur notre homme. Je savais que s’il vous plaisait de le ravoir vous enverriez des soldats après lui.

« Nous n’avions pas allumé notre pipe, ma femme et moi, que nous voyons deux hommes avec de petits fusils et pas de fardeau,