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LE BUT. — ET APRÈS.

— Où allez-vous ?

— Chez les honnêtes gens.

— C’est un nom qui n’appartient pas toujours à ceux qui s’en parent. Il se peut que vous rencontriez les méchants !

— Si l’on avait toujours peur du loup, on n’oserait jamais s’aventurer dans les bois, et on ne goûterait point aux fraises.

— Si j’étais un Cosaque plus dégourdi, mon vénérable, je t’aurais prié de me chanter un bout de chansonnette, et cela me ferait grandement plaisir, car j’adore le chant. Mais je suis plus timide qu’une jeune épousée, et je n’ose insister. »

Maroussia voulut voir mieux ce « timide » ; mais la tête du gaillard se trouva si haut placée qu’elle ne put apercevoir que sa fameuse paire de moustaches, qui pendaient comme deux gerbes de foin.

« Tu es timide, répondit Tchetchevik ; mais tâche de reprendre courage. Que veux-tu que je te chante ?

— Chante-moi n’importe quoi. »

Le musicien murmura à demi voix ce refrain :

« Ne dormez pas, même la nuit. C’est la nuit que les loups rôdent ; pour ne pas se laisser surprendre par eux, c’est quand tout semble reposer qu’il faut avoir l’œil ouvert. »

— Ton refrain me plaît et il est de circonstance, dit le timide, tu peux passer. Je m’étais bien promis, quand je t’ai laissé entrer sans te rien dire, il y a