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droient que haine pour prix de leur amour, bientôt on y réussit ; étoit-il cependant assez insensé de croire que la Reine, partie de Vienne à treize ans, ne pouvant obtenir dans sa Patrie qu’un rang secondaire la préféroit à la France dont elle étoit Reine, à la France séjour si délicieux, aux Français avec lesquels sa grace et sa gaieté lui donnoient alors tant d’analogie. Ah ! lorsqu’en la nommant je viens à parler d’éclat et de gaieté, mon cœur se serre douloureusement, je me rappelle ce tombeau placé près des lieux où l’on donnoit des fêtes, avec cette inscription et moi aussi je vivois en Arcadie, elle existe encore l’infortunée qui me retrace ce souvenir, mais hélas cette triste allusion n’en est que plus déchirante, les fêtes c’étoit un trône, la tombe c’est un cachot. Toutes les vraisemblances doivent prouver l’attachement de la Reine pour la France et quels faits peut-on alléguer pour détruire de si fortes conjectures ? L’alliance de l’Autriche avec la France ? C’est en 1756, avant la naissance de Marie Antoinette quelle a été conclue, depuis aucune raison de la rompre ne s’étoit présentée, aucun Ministre ne l’avoit proposé. Il est vrai que la Reine ne s’est pas mêlée de la politique de France uniquement pour brouiller sa mere ou son frere avec son mari, il est vrai que toute sa vie