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le ciel mon foible cœur. Mon imagination a peuplé ma solitude, et le désert pour moi, ce sera le monde. Mais quand les dix années de mon vœu étoient accomplies, je devois chercher un protecteur pour ma fille. Voyez, mon père, voyez quelle providence spéciale a conduit mes premiers pas : je vous trouve, et ce tombeau m’apprend que mon ennemi n’existe plus.

L’ERMITE.

Il n’étoit plus votre ennemi, madame, l’infortuné dont j’ai recueilli les derniers soupirs. Il traînoit partout, depuis plusieurs années, les remords qui le dévoroient ; il croyait que depuis long-temps vous n’existiez plus, et que son crime étoit irréparable. Cependant il avoit résolu de partir pour la guerre sainte, afin de vous justifier auprès de votre époux ; mais il ne lui a pas été permis d’expier ses forfaits. La mort lui en a ravi les moyens. Ah ! s’il avoit pu se douter qu’il étoit si près de vous !

GENEVIÈVE.

Et vous a-t-il dit, mon père, quel étoit le sort de Sigefroi ?

L’ERMITE.

Il n’étoit point encore revenu de la guerre où son courage l’avoit conduit.