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t’attendrai sur l’autre rive, car je dois t’y précéder ; mais c’est à toi seul que je confie mon nom parmi les Grecs. Tu le sais, le langage des favoris des dieux n’est compris, que d’un petit nombre de mortels ; et le triste avantage du génie, c’est de vivre au milieu des hommes, sans pouvoir se faire entendre de la plupart d’entre eux. Toi, mon concitoyen dans la patrie des arts, apprends aux siècles futurs ce que fut Sapho, et surtout ce qu’elle pouvoit être.

ALCÉE.

Que dites-vous, Sapho ? jamais votre talent n’eut plus d’éclat et de force.

SAPHO.

Le serpent a piqué la fleur ; qu’importe qu’elle soit encore sur sa tige ! C’en est fait ; il n’y a plus de printemps pour elle : quand elle tombera, ce sera pour toujours.


Scène II.


SAPHO, CLÉONE, ALCÉE.
SAPHO.

Cléone, vous êtes belle, et la couronne blanche sied à vos innocens regards.