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CLÉONE.

Le ciel m’est témoin que je n’ai rien fait pour captiver l’imagination de Phaon. J’étois avec ta sœur, à qui tu m’avois confiée ; il vint m’inviter, et nous exécutâmes ensemble cette danse brillante qu’on a surnommée le labyrinthe de Crète. « Jeune fille, me dit-il, que tes pas sont légers ! Atalante ne charmoit pas comme toi les yeux de l’amant qui cherchoit à retarder sa course. » Je l’écoutai quelques instans, car je ne le connoissois pas : il me suivit pendant toute la fête ; il voulut savoir mon nom et le tien, et me déclara qu’il étoit résolu de m’unir à lui, si j’y consentois. C’est alors qu’il se nomma, et que j’appris qu’il étoit ce Phaon dont Sapho m’avoit entretenue tant de fois. Alors je lui rappelai ses liens avec elle ; il rougit et baissa les yeux. Jeune fille, me dit-il, je ne puis plus l’aimer après t’avoir vue ; et moi, lui répondis-je, je ne recevrai jamais les hommages de celui qui peut être infidèle à la femme la plus digne de l’admiration et de l’amour. À ces mots je l’ai quitté, et, depuis ce jour, je ne l’ai point revu.

DIOTIME.

C’est le lendemain de cette fête qu’il a quitté Sapho, et qu’il est parti pour la Sicile ?