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AGAR

sans défense contre la nature, enfant comme toi devant elle, et moins digne que toi de l’attendrir.

Ismaël, rêvant.

Ah ! des orangers, des fruits désaltérans, de l’eau, ma mère… ce soleil…

Agar.

Il rêve, et pendant son sommeil l’ardeur des rayons le consume ; je veux essayer de l’en garantir avec mon voile. (Elle détache son voile.) Parure des jours de fêtes, don que me fit Abraham quand il m’aimoit, quand il m’appeloit son Agar, servirez-vous encore à son fils ! (En voulant tendre son voile sur la tête d’Ismaël elle fait un faux pas, et renverse le vase qui contenoit sa provision d’eau.) Dieu puissant ! ah ! L’eau, l’eau qui devoit sauver mon fils, elle est renversée, il n’en reste plus une goutte. C’est moi qui ai tué mon fils. Ô terre impitoyable, entr’ouvre-toi.

Ismaël.

Ma mère… j’entends ses cris, où est-elle ? ah ! ma mère, tu es couchée à terre comme l’infortuné que je viens de voir.

Agar.

Ismaël, Ismaël !