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DANS LE DÉSERT.

mais Sara, la barbare Sara, que d’outrages j’en ai reçus !

Ismaël.

Son fils Isaac aussi m’a cruellement traité : je le chérissois pourtant depuis qu’il est né ; je jouois avec lui, tout petit qu’il étoit ; j’allois chercher ce qui lui plaisoit pour le réjouir, et le cruel, quand je l’appelais mon frère, m’appeloit son esclave. Ma mère, pourquoi Sara, pourquoi son fils ne nous aiment-ils pas ? Toi surtout, ma mère, toi, qui pourroit te haïr ! D’où vient donc que nous sommes ici ?

Agar.

Mon enfant, je t’ai dit tout ce que je savois. Supportons notre sort avec courage. (Elle se lève.) Essaie encore de faire quelques pas. Peut-être trouverons-nous plus loin de l’ombre, quelques fruits, une source rafraîchissante.

Ismaël.

Ma mère, je ne vois rien que du sable, et ce soleil est si ardent ! Ah ! si je le priois de se voiler pour nous. (Il se jette à genoux.) Soleil !…

Agar.

Mon enfant, que fais-tu ? c’est Dieu qu’il faut prier ; c’est lui qui a créé le soleil ; c’est lui qui est notre père.