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LE CAPITAINE.

Et toi aussi, tu es de la conspiration. Tu veux faire épouser à ma fille ce blanc-bec ; tu veux faire tomber ma famille en quenouille ; tu veux qu’on y fasse de l’esprit à l’eau rose, au lieu de servir son pays, et de recommencer le capitaine Kernadec, qui, morbleu ! n’est pourtant pas encore fini. Quand je passe sur le port, tous les marins me saluent ; on me dit : « Capitaine, vous étiez là un tel jour », et je crois y être encore. Et j’irois me promener avec ce freluquet, qui m’appelleroit mon père, et qu’on croiroit de ma façon ! Non, Nérine, je n’en veux pas entendre parler.

NÉRINE.

Eh bien ! à la bonne heure.

LE CAPITAINE.

Te voilà triste ! tu pleures ! Écoute, Nérine, j’ai le cœur dur, on le dit du moins ; et, en effet, il y a des jours où je suis brutal comme un boulet de canon ; mais quand je te vois pleurer, tiens, cela me fait mal là (mettant la main sur son cœur).

NÉRINE.

Oui, sans doute. Et votre pauvre fille souffre aussi là, de ne pas épouser celui qu’elle aime.