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QU’EST-CE QUE DIEU ?

lui-même. C’est pourquoi le mot de Thomas d’Aquin n’a pas grande valeur : à savoir que Dieu ne peut pas être prouvé à priori, parce qu’il n’a pas de cause.



CHAPITRE II


QU’EST-CE QUE DIEU ?


Après avoir démontré que Dieu est, nous avons à nous demander ce que Dieu est. Nous disons que c’est un être dont on peut tout affirmer, c’est-à-dire un nombre infini d’attributs[1], dont chacun dans son espèce est infiniment parfait.

Pour bien faire comprendre notre pensée, nous poserons les quatre propositions suivantes :

1o Il n’y a pas de substance finie, mais toute substance doit être infiniment parfaite en son essence ; c’est-à-dire qu’il ne peut y avoir dans l’entendement infini de Dieu, aucune substance plus parfaite que celle qui existe déjà dans la nature.

2o Il n’existe pas deux substances égales.

3o Une substance ne peut en produire une autre.

4o L’intellect divin ne contient aucune substance qui n’existe formellement dans la nature[2].

  1. La raison en est que, le rien ne pouvant avoir aucune propriété, le tout doit avoir toutes les propriétés ; et comme le rien n’a pas d’attributs, parce qu’il n’est rien, le quelque chose a des propriétés, parce qu’il est quelque chose ; et, en conséquence, plus un être est quelque chose, plus il doit avoir de propriétés. Par conséquent, Dieu, qui est le plus parfait, l’Infini, le Tout, doit donc avoir d’infinies, de parfaites propriétés, et même toutes les propriétés. (MS)
  2. Nous pouvons maintenant prouver qu’il ne peut pas y avoir de substance finie : toute substance doit donc appar-