Page:Spinoza - Court traité sur Dieu, l’homme et la béatitude.djvu/64

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
8
DIEU, L’HOMME ET LA BÉATITUDE

lesquelles propriétés ne peuvent être inventées par lui, puisqu’il est imparfait. Or, qu’il connaisse ces propriétés, c’est ce qui est évident : en effet, il sait, par exemple, que l’infini ne peut être formé de diverses parties finies ; qu’il ne peut pas y avoir deux infinis, mais un seul ; qu’il est parfait et immuable ; il sait aussi qu’aucune chose par elle-même ne cherche sa propre destruction, et en même temps que l’infini ne peut se changer[1] en quelque chose de meilleur que lui-même, puisqu’il est parfait, ce qu’alors il ne serait pas ; et encore qu’il ne peut être subordonné à quelque autre chose, puisqu’il est tout-puissant, etc.

On voit donc que Dieu peut être prouvé à priori comme à posteriori, et même beaucoup mieux à priori, car des choses prouvées à posteriori ne le sont que par une cause extérieure à elles, ce qui est en elles une évidente imperfection, puisqu’elles ne peuvent se faire connaître par elles-mêmes, et seulement par des causes extérieures. Dieu cependant, la première cause de toute choses, et même la cause de lui-même, Dieu doit se faire connaître lui-même par

    qu’elles ne nous font connaître rien de substantiel ; ce ne sont que des adjectifs, qui demandent le substantif pour être éclaircis. (MS.)

  1. La cause d’un tel changement devrait être en dehors de lui, ou en lui. Elle ne peut être en dehors de lui, car aucune substance, existant par soi (comme est celle-ci), ne dépend de quelque chose d’extérieur et n’est par conséquent soumise à aucun changement ; ni en lui, car aucune chose, et encore moins celle-ci ne veut sa propre altération ; toute altération vient du dehors. En outre, qu’il ne puisse pas y avoir de substance limitée, cela est évident ; puisqu’elle devrait alors avoir quelque chose qui viendrait du néant, ce qui est impossible, car d’où aurait-elle ce par quoi elle se distinguerait de Dieu ? Sans doute, pas de Dieu, car celui-ci n’a rien d’imparfait, ni de limité. D’où donc, si ce n’est du néant ? (MS.)