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XXIV
INTRODUCTION

qu’il est éternel et infini et qu’il dépend immédiatement de l’étendue divine. C’est, dit Spinoza, dans un langage un peu théosophique, le Fils de Dieu.

2o L’intellect est aussi un mode éternel et infini, qui dépend de la pensée de Dieu, comme le mouvement dépend de l’étendue de Dieu. C’est la faculté de tout connaître en tout temps clairement et distinctement : d’où résulte une félicité parfaite et immuable. Il y a ici une contradiction avec l’Éthique, au moins dans les mots : car, dans l’Éthique, si Spinoza reconnaît en Dieu l’attribut de la pensée, il lui refuse cependant un intellect, comme trop humain. Cependant la trace de ce mode infini, intermédiaire entre l’attribut de la pensée et les modes de la pensée ou les pensées particulières, subsiste encore, sous le nom d’idée de Dieu, qui, dans l’Éthique, est le seul mode de ce genre dont Spinoza fasse mention.

Toujours est-il que Spinoza, en attribuant à Dieu, dans ce premier ouvrage, non pas seulement la faculté impersonnelle de pensée, mais encore l’intelligence ou faculté de connaître accompagnée de bonheur, ce qui implique manifestement la conscience, laisse encore à Dieu une sorte de personnalité, qui s’effacera sans doute, mais ne disparaîtra jamais complètement, même dans l’Éthique[1].

IV

Des passions. — Après avoir traité de Dieu et de sa nature, Spinoza passe à l’étude de ses modes, non pas de tous, dit-il, car ils sont innombrables, mais de ceux qui concernent et qui constituent l’homme.

  1. Sur la question de la personnalité divine dans Spinoza, on peut consulter Voigtländer, Spinosa nicht pantheist, sondern theist (Theol. Studien und Kritiken, 1841, Keft 3) ; Löwe, Uber den Gottesbegriff Spinosa's. (Stuttgart. 1862) et Böhmer, Spinosana (Zeitschrift für die exacte philosophie, 1863, t. XLI, p. 92).