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DIEU, L’HOMME ET LA BÉATITUDE

2o Que Dieu est connu par lui-même et non par autre chose ;

3o Enfin que, par cette raison, la nature nous unit à lui, de manière que nous ne pouvons ni exister ni être conçus sans lui.

D’où il suit que nous ne pouvons le connaître qu’immédiatement.

Essayons d’expliquer cette union que nous avons avec Dieu par la nature et par l’amour.

Nous avons dit qu’aucun objet ne peut être dans la nature sans qu’il en existât une idée dans l’âme de cet objet[1] ; et que, suivant qu’une chose est plus ou moins parfaite, l’union de cette idée avec la chose ou avec Dieu même, et l’action (de cette idée) est plus ou moins parfaite. Maintenant, toute la nature n’étant qu’une seule substance, dont l’essence est infinie, toutes les choses sont unies par la nature et sont unies en un seul être qui est Dieu. Et comme le corps est la première chose que notre âme perçoit (puisque, comme nous l’avons dit, aucun objet ne peut être dans la nature dont l’idée ne soit dans la chose pensante elle-même, laquelle idée est l’âme de cet objet), il s’ensuit que cet objet doit être la première cause de l’idée[2]. Mais, comme aucune idée ne peut se reposer dans la connaissance du corps, sans passer aussitôt à la connaissance de

  1. Par là s’explique ce que nous avons dit dans la première partie, à savoir que l’intellect infini, que nous appelions le Fils de Dieu, doit être de toute éternité dans la nature, car, Dieu étant de toute éternité, son idée (l’idée de Dieu) doit être de toute éternité dans la chose pensante, c’est-à-dire en lui-même, laquelle idée convient objectivement avec lui. (MS.)
  2. C’est-à-dire dans notre âme, qui est l’idée du corps et tire de lui son origine, et n’est que sa représentation et son image, soit dans l’ensemble, soit en particulier dans la chose pensante. (MS.)