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DE LA FAVEUR (BIENVEILLANCE)

les employer à l’utilité de notre prochain et pour son amendement, mais encore qu’à cet effet nous pouvons restreindre notre liberté (j’entends la liberté parfaite permise). Par exemple, si quelqu’un s’habille magnifiquement pour se faire admirer, il cherche un honneur qui a sa source dans l’amour de soi, sans aucune préoccupation pour son prochain ; mais si un homme voit sa sagesse (par laquelle il pourrait être utile à son prochain) dédaignée et foulée aux pieds parce qu’il est humblement vêtu, il aura raison, pour venir en aide aux autres hommes, de choisir un vêtement qui n’offense pas les yeux, et de se rendre semblable à son prochain pour se concilier sa bienveillance.

Quant à l’impudence, elle est de telle nature que sa définition seule suffit pour en faire voir le défaut.




CHAPITRE XIII


DE LA FAVEUR (BIENVEILLANCE), DE LA GRATITUDE ET DE L’INGRATITUDE.


Les deux premières de ces passions sont des affections de l’âme qui nous portent à rendre ou à faire du bien à notre prochain. Je dis rendre, lorsque nous faisons du bien à notre tour à celui qui nous en a fait le premier ; je dis faire, lorsque c’est nous-mêmes qui avons obtenu quelque bien[1].

  1. Il y a là quelque confusion dans la rédaction ; mais la pensée est très-claire. (P. J.)