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NOVALIS DEVANT LA CRITIQUE
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jeune école a prêté tant d’importance, nous répondrions sans détour que, né au sein d’une famille piétiste, préparé à la poésie par son éducation (?), lecteur assidu de Zinzendorf, de Lavater, des mystiques et des néo-platoniciens, et surtout consumé par une phtisie précoce, il semble avoir vécu dans un état de perpétuelle agitation, dans un sentiment d’isolement et de tristesse, dont les expressions littéraires ne revêtent nullement à nos yeux ce caractère de profondeur qu’ont voulu y découvrir les amis du défunt » (ibid. p. 653). On trouverait en lui, si on allait au fond des choses, une nature foncièrement « prosaïque » (sic), un habile rhapsode, doublé d’un mystificateur. « Déjà la plupart des contemporains ne savent plus qu’il y ait eu un Novalis, ni ce qu’il a été » (ibid. p. 655).

Le jugement de Gervinus a fait école parmi un certain nombre d’historiens de la littérature de la même génération, chez qui les nouvelles aspirations nationales n’avaient pas encore transformé le vieux fonds de libéralisme doctrinaire. Gottschall (Die deutsche Nationallitteratur in der ersten Hælfte des 19ten Jahrhunderts, Breslau, 1855, I, p. 237 ss.) ne fait pas grand cas des écrits de Novalis. Il n’en souligne que l’aspect maladif, les caractères négatifs. Henri d’Ofterdingen, dit-il, est une œuvre manquée ; « l’auteur était incapable de créer une intrigue intéressante ou de développer un motif psychologique » (p. 240). Le roman contient pêle-mêle toutes les doctrines métaphysiques du romantisme, — de même que la Lucinde de Schlegel en résume les aspirations morales. « Sur cette confusion de l’imagination capricieuse et de la poésie, de la beauté artistique objective et de l’organe individuel qui sert à la produire, sur cette vague identification de l’imagination universelle et de la faculté productrice chez le poète, reposent les dogmes esthétiques fondamentaux du romantisme » (p. 239). Quant au fond moral c’est « un mélange d’aspiration séraphique et d’épicuréisme terrestre » (p. 237). — Plus dédaigneux encore est le jugement de Gœdeke, dont le Précis