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pour s’assurer un revenu, nous commençons à avoir en Angleterre le philanthrope par profession, celui qui demande à la philanthropie de lui rapporter de l’argent, une position, ou les deux à la fois. Supposez un jeune clergyman éprouvant le besoin d’un bénéfice : il est profondément affecté du dénuement spirituel d’un faubourg qui a poussé au-delà des paroisses établies ; il s’efforce de rassembler des fonds pour construire une chapelle et il est probable qu’en faisant sa quête, il ne cherchera pas à atténuer la grandeur du mal auquel il s’agit de porter remède. De même un homme ayant de l’éducation, et plus riche en loisirs qu’en revenus, sera si vivement impressionné par telle ou telle plaie sociale, si désireux de la guérir, qu’il deviendra le promoteur d’une institution ou l’instigateur d’un mouvement. Son succès dépendant de l’impression produite par le fait qu’il établit, il ne faut pas s’attendre à ce qu’il passe légèrement sur les maux qu’il prétend panser, pour s’appesantir sur les circonstances défavorables à ses plans. Nous avons vu nous-même des gens qui s’étaient remués en faveur de projets soi-disant d’utilité publique, se considérer comme lésés, parce que, leurs idées adoptées, on ne leur avait pas donné de place payée. Le scandale qui a eu lieu dernièrement à propos de l’Association des dortoirs-libres, montre où on en peut arriver en ce genre ; et il a été établi au meeting de la Société pour l’Organisation de la Charité, que ce n’était pas une exception. L’altération du témoignage accompagne inévitablement ces scandales. Une personne qui s’est occupée sous mes yeux, pendant trente ans, des Ligues, Alliances, Unions, etc., etc., écrivait « Les associations ont des credos tout comme les corps religieux ; chaque adhérent est tenu de prôner le shibboleth de son parti… tous les faits sont dénaturés pour servir leurs vues et ceux qu’on ne peut dénaturer sont supprimés. » « Toutes les associations, sans exception, avec lesquelles je me suis trouvé en rapport, ont pratiqué ce genre de fraude. »

Les choses ne se passent pas autrement lorsque le mouvement a un but politique en vue. Des associations fondées pour combattre certains abus criants, finissent, hélas ! trop souvent par subsister et par fonctionner, principalement, si ce n’est même exclusivement, dans l’intérêt per-