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lement certaines facultés et certaines aptitudes, ce qui exige des membres, des sens et un système nerveux déjà très-perfectionnés. Mais chaque accroissement de grandeur obtenu au moyen de cette organisation imparfaitement développée sera nécessairement accompagné d’une modification dans l’organisation elle-même. Si celle-ci s’adaptait exactement à la taille au-dessous, elle ne s’adaptera plus à la taille au-dessus. Elle a donc besoin d’être refaite, démontée et remontée, opération qui sera d’autant plus difficile que la machine sera plus parfaite.

Le système osseux nous montre comment la difficulté est résolue. Dans le fémur d’un jeune garçon, par exemple, il y a entre la tête de l’os et la diaphyse un endroit où subsiste l’état cartilagineux primitif ; c’est par là que s’allonge le corps de l’os au moyen de l’addition de nouveaux cartilages où la matière osseuse vient se déposer ; le même phénomène se produit à un endroit correspondant à l’autre extrémité de la diaphyse. Sur ces deux points, l’ossification ne s’achèvera que lorsque l’os aura cessé de grandir. Que l’on réfléchisse à ce qui serait arrivé si l’ossification s’était complétée avant que l’allongement fût terminé ; on verra combien était redoutable pour la croissance l’obstacle ainsi évité. Ce qui se passe pour le fémur se passe pour tout l’organisme ; un certain degré d’organisation est nécessaire à la croissance ; poussée plus loin, l’organisation arrête la croissance.

Nous pouvons constater la nécessité de cette relation dans un cas plus complexe, celui du développement d’un membre tout entier. La grandeur d’un membre est en général dans un rapport déterminé avec celle du reste du corps. Si l’on donne à ce membre une activité anormale, sa force et son volume augmenteront dans une limite restreinte. Si l’activité anormale commence de bonne heure, le membre peut dépasser de beaucoup les dimensions ordinaires ; si elle ne commence qu’après la maturité, le changement est moindre. Dans aucun cas pourtant il ne devient très-considérable. Voyons ce qui se passe lorsqu’un membre grossit, et nous comprendrons la cause du fait que nous venons de signaler. Un surcroît d’activité attire le sang en plus grande abondance ; pendant quelque temps de nou-