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n’est pas une science) ; mais il affirme implicitement qu’il n’y a pas de relations de cause entre les états successifs de l’esprit car l’acte de volonté par lequel « les causes naturelles peuvent être écartées » est mis en opposition avec les choses naturelles, et par suite doit être considéré comme surnaturel. Par le fait, cela nous ramène à ce type primitif d’explication que nous avons examiné au début.

En outre, de ce que certains actes de volonté ne peuvent être prévus, M. Froude conclut qu’aucun acte de volonté ne peut l’être ; il ignore que les actes de volonté par lesquels notre conduite ordinaire est déterminée sont si réguliers, qu’il est facile de les prévoir avec une extrême probabilité.


Si, en traversant la rue, un homme voit une voiture se diriger sur lui, on peut hardiment assurer que dans neuf cent quatre-vingt-dix-neuf cas sur mille, il tâchera de ne pas se faire écraser. Si un homme, pressé d’arriver à une station pour prendre le train, sait que par une route il n’a qu’un mille à faire et que par l’autre route il en a deux, on peut affirmer avec confiance qu’il prendra la première ; et si cet homme est convaincu qu’en manquant le train il perdra une fortune et qu’il n’ait que dix minutes pour faire le mille dont il s’agit, il est presque certain qu’il se mettra à courir ou qu’il prendra un cab. S’il peut acheter à sa porte une marchandise de consommation journalière, et qu’à l’autre bout de la ville cette marchandise soit moins bonne et plus chère, il faudra, nous pouvons l’affirmer, qu’il existe entre lui et le marchand éloigné des relations d’un genre particulier, pour qu’il se décide à acheter la mauvaise marchandise qui lui coûte plus de peine et d’argent. S’il veut se défaire d’une propriété, il n’est pas tout-à-fait impossible qu’il la vende à A pour mille livres, bien que B lui en ait offert deux mille, cependant les raisons qui peuvent le pousser à agir de la sorte sont si insolites, qu’elles n’empêchent pas d’émettre ce principe général qu’un homme vend toujours à celui qui lui fait l’offre la plus élevée. Maintenant, puisque les actions les plus fréquentes des citoyens sont déterminées par des motifs si réguliers, il doit en résulter des phénomènes sociaux qui se produisent avec une régularité correspondante, — et même avec une régularité bien plus grande, car les