Page:Spencer - La Science sociale.djvu/154

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Passons à d’autres usages domestiques. Mettez une personne au défi d’imaginer toutes les anomalies possibles, jamais elle ne tombera sur un usage qui se rencontre chez les Basques et qui a existé chez d’autres races ; quand une Basque accouche, le mari se met au lit et reçoit les félicitations des amis, tandis que sa femme vaque aux soins du ménage. Quelle est aussi la personne qui, cherchant les divers effets pouvant résulter de la naissance d’un fils, penserait au suivant ? Chez certains peuples de la Polynésie, le père auquel il naît un garçon est immédiatement dépossédé de tout son bien ; il ne fait plus que l’administrer, en qualité de tuteur, au profit de l’enfant. Les différentes variétés de relations de parents à enfants existantes et les sentiments qui les accompagnent nous font voir à chaque instant des choses aussi extraordinaires et aussi inexplicables à première vue. Il ne viendrait à l’esprit de personne qu’il existe un pays où il est du devoir des enfants d’enterrer leurs parents tout vivants. C’est pourtant ainsi que cela se passe chez les Fijiens. On ajoute que les parents dont on se débarrasse par ce procédé marchent à la tombe en souriant. Il semble presque aussi incroyable, qu’il y ait des gens aux yeux desquels il soit plus convenable de témoigner de l’affection aux enfants des autres qu’aux siens propres. Les tribus montagnardes de l’Inde nous fournissent cependant un exemple de ce phénomène.

« Chez les Nairs tout homme considère les enfants de sa sœur comme ses héritiers… et il passerait pour un monstre contre nature, si à la mort d’un enfant qu’il a lieu de croire sien, il donnait les mêmes marques de chagrin qu’à la mort d’un enfant de sa sœur[1].

« Dans l’amour de la progéniture tel que le conçoit l’Europe philosophique, tout est étrange, l’idée et le mot, pour un Nair du Malabar. Dès sa plus tendre enfance, celui-ci apprend que son oncle lui est plus proche parent que son père et que par conséquent cet oncle aime plus son neveu que son propre fils[2]. »

Il serait facile de multiplier les exemples à l’infini. Le

  1. Cité dans Primitive Mariage de M’Lennan, p. 187.
  2. Burton, History of Sindh, p. 224.