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CHAPITRE VI

DIFFICULTÉS SUBJECTIVES VENANT DE L’INTELLIGENCE

Voici un enfant et sa mère. Celle-ci est assez bornée. Observez-les ; vous serez frappé de l’incapacité que montre la mère d’entrer dans les sentiments et les pensées du baby. Celui-ci a besoin de dépenser son activité ; il a envie de tout voir, il est toujours en mouvement et son agitation impatiente sa mère. Supposons qu’on soit en chemin de fer. L’enfant voudrait regarder par la portière ; on le lui défend ; alors il grimpe sur la banquette ou touche aux paquets. — Assois-toi et ne bouge pas. — Je te dis de descendre. — Veux-tu te tenir tranquille ? — Toutes les demi-minutes vous entendez une apostrophe de ce genre. Nous reconnaissons que c’est en partie dans l’intérêt des autres voyageurs. Mais, ainsi qu’il vous sera aisé de vous en assurer dans des instants où ce motif n’existera pas, c’est surtout par respect pour ce qui constitue, dans son esprit, les convenances, que la mère s’efforce de réprimer cette activité enfantine ; et elle le fait sans se rendre compte de la grandeur de la peine qu’elle inflige. Elle-même a cependant traversé cette phase de la curiosité intense, ce jeune temps où chaque objet entrevu en passant a le charme de la nouveauté et où la sève surabondante cause, si on ne la laisse déborder, une irritation pénible. Cependant elle ne sait plus comprendre l’ardeur de ce désir de voir qu’elle désappointe,